Nicolas Sarkozy, Benoît XVI et la laïcité (11 septembre 2008)

sarkozybenoit.jpgN'en déplaise au collectif "remballe ton pape!", il n'y a rien de choquant à ce que le président de la République française reçoive le chef de l'État du Vatican. Accueillir un chef d'État étranger n'a jamais signifié cautionner tous les actes ou toute la pensée dudit chef d'État. Cette visite ne constitue donc pas, en soi, une attaque contre la laïcité ! Et il faut vraiment être de mauvaise foi – sans jeu de mot – pour clamer le contraire.

Quant au Pape, chef de l'Église catholique, il est tout à fait normal qu'il veuille aller à la rencontre d'un peuple dont la majorité des croyants se revendiquent de son autorité spirituelle (et même, d'ailleurs, si ce n'était pas le cas !). Je dis bien "spirituelle". Et c'est là que l'argumentation du collectif "remballe ton pape!" tombe à l'eau. Qu'une Église dise ce qu'elle considère comme bon ou juste n'a rien d'attentatoire à la liberté individuelle. C'est, justement, ce que permet ce bien précieux qu'est, en France, la laïcité. Ce n'est en effet que lorsque pouvoir politique et pouvoir spirituel se confondent que commencent les atteintes à la liberté individuelle. Sauf en cas d'un improbable dérapage théocratique, les propos de Benoît XVI, chef d'État étranger, ne pourront donc en rien constituer une attaque contre la laïcité. Non-croyants ou croyants d'une autre religion, nous sommes libres de les écouter ou non, de les critiquer ou de les approuver.

Personnellement, c'est plutôt Nicolas Sarkozy, président de notre République, qui m'inquiète. Cette semaine, un de ses proches m'assurait que le chef de l'État n'irait "pas plus loin" que dans ses discours de Latran (20/12/2007) et Riyad (14/01/2008). "Si tu vas plus loin, tu me retrouveras dans la rue avec les manifestants", lui a même répondu cet interlocuteur commun. Se voulant rassurant, ces propos m'ont, au contraire, plutôt inquiété en ce qui concerne l'état d'esprit profond de Nicolas Sarkozy...

D'autant plus que sa "laïcité positive" constitue, déjà, une attaque directe contre la laïcité (la laïcité point : ajouter un qualificatif est d'emblée suspect; comme si la laïcité française, historique, républicaine était une laïcité "négative" ou "fermée"). Plutôt que de faire un copié-collé, je vous renvoie à ma note du 17 janvier dernier sur la "laïcité positive".

"François Mitterrand n'avait laissé aucune consigne à ses proches, leur disant simplement qu'une messe est possible, poursuit mon interlocuteur. Nicolas Sarkozy est également en recherche. Mais ce n'est pas dans son tempérament volontariste de laisser les autres décider à sa place". Je respecte profondément la quête spirituelle de l'être humain. Je la comprends, même. Mais ledit être humain est aussi président d'une République laïque. Et, hors conversations privées, c'est à ce seul titre qu'il doit s'exprimer et se comporter face à un chef religieux. Car la France ne doit pas devenir le laboratoire d'expérimentation d'une quête spirituelle personnelle.

 

 

P.S.: le plus drôle, c'est que certains signataires du collectif "remballe ton pape!" s'étaient opposés à la loi encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics !

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