Congrès de l'UDF (30 janvier 2006)

L'UDF indépendante mais toujours au gouvernement

 

Sans surprise, la motion d'orientation politique de François Bayrou a été plébiscitée par les militants de l'UDF, avec le soutien de 90,9% des 13 500 votants. Par ce vote, l'UDF, qui se définit désormais comme "le parti libre", réaffirme son indépendance vis-à-vis de l'UMP. En face, ceux qui défendent l'appartenance de l'UDF à la majorité et l'alliance avec l'UMP ont préféré ne pas déposer leur propre motion. En l'absence de Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, le député Jean Dionis du Séjour est le seul à avoir défendu cette position à la tribune. "La seule majorité qui nous intéresse, c'est celle que la France va se donner en 2007", a tranché François Bayrou dans son discours de clôture.

La présidentielle est en effet la seule élection permettant de bousculer le clivage droite gauche, comme l'ont montré les précédents de 1969 (second tour entre la droite et le centre) et 2002 (second tour entre la droite et l'extrême droite). Tout en récusant la formule "ni droite ni gauche", François Bayrou veut incarner "une force nouvelle, non pas entre la droite et la gauche, mais qui s'oppose aux deux". Ce positionnement tercériste était déjà celui de Jean-Pierre Chevènement à la présidentielle de 2002. Le président de l'UDF a en outre promis que le candidat de son parti se refusera "de faire la moindre promesse électorale", mais exposera "les principes d'un projet d'espérance pour la France".

François Bayrou mise donc en 2007 sur un double rejet du PS et de l'UMP. Pour ses conseillers, le 21 avril 2002 (premier tour de la dernière présidentielle) et le 29 mai 2005 (référendum sur le projet de Constitution européenne) constituent autant de signes annonciateurs. Reste à savoir si les abstentionnistes et les électeurs protestataires transformeront ces choix en "vote Bayrou".

D'une part, les positions de l'UDF se sont toujours trouvées aux antipodes de cette France qui, du référendum sur le traité de Maastricht (1992) à celui sur la Constitution européenne, rejette la politique libérale globalement suivie par tous les gouvernements depuis 1983. En clin d'œil, François Bayrou a d'ailleurs repris à son compte le slogan du programme socialiste des années 1970 : "Changer la vie".

D'autre part, c'est tout l'enjeu de l'affirmation de son "indépendance", à chaque fois que la droite a été ces vingt dernières années au pouvoir, l'UDF était représentée au gouvernement. C'est toujours le cas avec Gilles de Robien, ancien directeur de campagne de François Bayrou à la présidentielle de 2002. La motion votée par les adhérents de l'UDF précise toutefois qu'elle "engage jusqu'à un nouveau congrès l'ensemble" du parti "et de ceux qui s'expriment en son nom".

Décryptage du parlementaire européen Bernard Lehideux, proche de François Bayrou : "Lorsque nous aurons voté, notre décision aura droit au respect de chacun et de tous et donc au silence des minoritaires, au moins jusqu'au lendemain de la présidentielle. Ou alors, je ferai partie de ceux qui demanderont des sanctions claires pour faire respecter notre décision commune."

De fait, les opposants à la ligne Bayrou ont déjà été sanctionnés par le passé. En février 2002, le bureau politique de l'UDF avait ainsi adopté une motion stipulant que "la cohérence et la clarté" étant "nécessaires à la conduite d'une campagne", "les membres de son exécutif qui ne soutiennent pas la candidature de François Bayrou n'exercent plus de responsabilité au sein de cet exécutif". Une sanction également infligée, le 14 juin 2005, à Gilles de Robien, en raison de sa participation au gouvernement. Dans l'échelle disciplinaire, les étapes suivantes sont la suspension puis l'exclusion du parti.

 

Laurent de Boissieu

© La Croix

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