Nicolas Sarkozy et François Bayrou recrutent à gauche (27 février 2007)

François Bayrou imagine depuis longtemps une majorité avec « des gens venus de la gauche, du centre et de la droite ». Même Nicolas Sarkozy, qui a pourtant bâti sa carrière politique sur l’affirmation d’une « droite décomplexée », parle désormais d’« ouverture ». Pour l’un comme pour l’autre, l’heure est donc au rassemblement au-delà du clivage droite-gauche. Traumatisme du 21 avril 2002 oblige, Ségolène Royal, elle, est plus en retrait sur cette question et s’est, jusque-là, surtout préoccupée de réunir la gauche. Au-delà du PS, elle est ainsi soutenue par le Parti radical de gauche (PRG), le Mouvement républicain et citoyen (MRC) chevènementiste ainsi que par Aurélie Filippetti, ancienne porte-parole des Verts à Paris.

Dans une tribune publiée hier dans Libération, François Bayrou a, lui, reçu le soutien de trente hauts fonctionnaires « socialistes et Français de gauche », réunis dans un collectif appelé « Spartacus ». « Pour les électeurs de gauche, le véritable vote utile pour faire barrage à Nicolas Sarkozy, c’est François Bayrou, écrivent-ils. Lui seul sera en mesure de battre le candidat UMP au second tour de la présidentielle. » Pour le reste, le filet du président de l’UDF n’est pour l’instant pas très rempli. À gauche, il a séduit Jean Peyrelevade , ancien directeur adjoint du cabinet de Pierre Mauroy à Matignon, et le journaliste « anti-pensée unique » Jean-François Kahn, fondateur de l’hebdomadaire Marianne. À droite, il a reçu le soutien de l’ancien parlementaire européen souverainiste William Abitbol, ex-bras droit de Charles Pasqua, ayant soutenu Jean-Pierre Chevènement en 2002.

Pour soutenir Nicolas Sarkozy, un club de « sarkozystes de gauche » s’est même créé : « La Diagonale ». On y trouve d’anciens membres du PS (Patrick Rajoelina, Philippe Sauvannet), le directeur délégué de l’Espace Pierre Cardin, Nicolas Laugero, et le docteur Véronique Vasseur, ancienne médecin-chef de la maison d’arrêt de la Santé. Du côté des politiques, les « sarkozystes » misent, à terme, sur le ralliement de personnalités de gauche comme les anciens ministres Bernard Tapie (PRG) et Georgina Dufoix (PS), l'ancien conseiller de François Mitterrand Jacques Attali, le sénateur du Haut-Rhin Jean-Marie Bockel (PS), ou encore le parlementaire européen Paul Vergès, du Parti communiste réunionnais.

Au centre, Nicolas Sarkozy bénéficie déjà du renfort de l’ancien rocardien Christian Blanc, député apparenté UDF, et d’une poignée d’élus UDF, la plupart dans les Hauts-de-Seine : le député Pierre-Christophe Baguet (exclu, depuis, du groupe UDF), la sénatrice de la Loire-Atlantique Gisèle Gautier (ralliée, depuis, au groupe UMP), le maire de Meudon, Hervé Marseille, et, surtout, le député et maire d’Issy-les-Moulineaux, André Santini.

En ce qui concerne les intellectuels de gauche, le filet de Nicolas Sarkozy est déjà bien rempli. Avec, d’un côté, ceux qui, souvent qualifiés de « néoconservateurs français », étaient favorables à la guerre en Irak et écrivent dans la revue Le Meilleur des Mondes : Pascal Bruckner, André Glucksmann et Marc Weitzmann. Et, de l’autre, l’ancien ministre et écrivain Max Gallo, ex-bras droit de Jean-Pierre Chevènement. Enfin, sur la même ligne « nationale-républicaine » que Max Gallo, Nicolas Sarkozy a embauché comme plume Henri Guaino, ex-séguiniste et ancien Commissaire général au Plan « anti-pensée unique ».

 

Laurent de Boissieu

© La Croix, 23/02/2007

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