Les deux Français inconnus du Parlement européen (27 novembre 2009)

La délégation française au Parlement européen va passer de 72 à 74 membres. L'incertitude demeure cependant sur le mode de désignation des deux élus supplémentaires.

 

– Pourquoi la France a-t-elle droit à deux sièges de plus ?

Avec l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le 1er décembre prochain, la composition du Parlement européen ne sera plus celle inscrite dans le traité de Nice (complétée ensuite par les traités d'adhésion) mais celle définitivement fixée par le Conseil européen des 18 et 19 juin 2009.

Auparavant, le Conseil européen des 11 et 12 décembre 2008 avait précisé que "l'objectif est de faire en sorte que cette modification entre en vigueur, si possible, dans le courant de l'année 2010". C'est-à-dire, sans doute, dans le contexte de la présidence espagnole du Conseil de l'Union européenne (de janvier à juin 2010), l'Espagne étant le principal bénéficiaire de la nouvelle répartition des sièges avec quatre représentants de plus*. Au total, douze États sont concernées. Dont la France, avec deux eurodéputés supplémentaires.

Dans l'Hexagone, au regard de leur population actuelle, les deux circonscriptions européennes qui devraient élire un élu de plus sont l'Ouest (un élu pour 947 369 habitants) et le Massif central - Centre (un élu pour 944 788 habitants).

 

- Quelles sont les hypothèses ?

Le Conseil européen des 18 et 19 juin 2009 avait décidé que "pour pourvoir ces sièges supplémentaires, les États membres concernés désigneront des personnes, conformément à leur législation nationale et pour autant qu'elles aient été élues au suffrage universel direct, notamment soit par une élection ad hoc, soit par référence aux résultats des élections européennes de juin 2009, soit par désignation par leur parlement national, en son sein, du nombre de députés requis".

Cette dernière hypothèse représente la solution la plus simple.

D'une part, reprendre les résultats de juin dernier pour distribuer deux sièges supplémentaires risquerait, selon un conseiller de l'Élysée, d'être entaché d'inconstitutionnalité.

D'autre part, organiser une élection ad hoc dans le cadre des actuelles circonscriptions pour élire deux eurodéputés serait lourd et, surtout, insiste la même source, contraire au principe de la représentation proportionnelle. D'où l'idée originale qui a germé de faire voter les 332 492 électeurs Français de l'étranger qui ont été exclus des élections européennes en juin dernier, c'est-à-dire ceux qui ne résidaient pas dans un État membre de l'Union et qui étaient uniquement inscrits sur la liste électorale consulaire.

Pour l'instant, l'Élysée, qui gère directement cette question, n'a pas officiellement tranché. "La France s'en tient à sa position : ses deux députés supplémentaires seront élus suivant une procédure législative particulière, élaborée par le secrétariat général du gouvernement", s'était contenté de répondre Bruno Le Maire, alors secrétaire d'État chargé des affaires européennes, après le scrutin.

 

- Quels sont les enjeux ?

Outre le fait de disposer d'un siège supplémentaire, quasi acquis pour l'UMP quel que soit le mode de désignation retenu, l'enjeu est important à gauche pour le PS et Europe Écologie. Aux élections européennes, ces deux forces politiques ont en effet obtenu exactement le même nombre d'eurodéputés (quatorze). Or, selon la solution retenue, l'attribution du second siège pourrait les départager. En reprenant, par exemple, les résultats de juin dernier, l'UMP aurait obtenu un élu supplémentaire dans l'Ouest (Agnès Le Brun) et le PS un également, dans la circonscription Massif central - Centre (Cécile Jonathan)**.

 

Laurent de Boissieu

© La Croix, 27/11/2009 (version un peu plus longue que celle publiée sur papier) 

* contrairement à la France, l'Espagne avait anticipé l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne en faisant élire quatre eurodéputés "fantômes" en juin dernier, conformément aux recommandations de la conférence intergouvernementale ayant approuvé le traité de Lisbonne, en octobre 2007.

** mardi dernier, José Bové (Europe Écologie) a évoqué l'Ouest et le Nord-Ouest, ce qui repêcherait son ami François Dufour. Or, compte tenu de sa population légale au 1er janvier 2009, cette circonscription est loin d'être la plus concernée par un éventuel siège supplémentaire, puisqu'avec un élu pour 938 430 habitants elle viendrait après l'Ouest (un élu pour 947 369 habitants), le Massif central - Centre (un élu pour 944 788 habitants) et même l'Est (un élu pour 942 977 habitants), circonscription où un siège supplémentaire irait à Europe Écologie (Jacques Muller).

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