L'UMP n'est pas parvenue à unifier la droite française (12 avril 2011)

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La décisions de Dominique de Villepin de ne pas renouveler son adhésion à l'UMP, puis celle de Jean-Louis Borloo de quitter le parti majoritaire, semblent annoncer un retour du pluralisme partisan à droite. L'ancien premier ministre chiraquien a créé l'année dernière son propre mouvement, République solidaire, et présentera jeudi son "projet pour une politique alternative". Tandis que le Parti radical, dont Jean-Louis Borloo est le président, devrait décider, lors de son 111e congrès, les 14 et 15 mai prochains, son départ en bloc de l'UMP.

La fondation de l'Union pour la majorité présidentielle puis de l'Union pour un mouvement populaire, en 2002, était pourtant le fruit d'une grande ambition: réunir au sein d'une formation unifiée toute la droite française, avec un candidat unique lors de l'élection présidentielle. Objectif presque atteint, puisque, depuis, le groupe UMP à l'Assemblée nationale réunit la quasi-totalité des députés de droite. Seuls sont restés en dehors les élus UDF en 2002, puis Nouveau centre en 2007, de même que ceux du Mouvement pour la France de Philippe de Villiers.

Les éventuelles candidatures à la prochaine présidentielle de Dominique de Villepin et de Jean-Louis Borloo pourraient toutefois changer la donne en remettant en cause l'hégémonie, à droite, de l'UMP et de son candidat. Dès ce mardi, Pascal Vilain, président de la fédération du Loiret du Parti radical, a ainsi lancé, à Orléans, le premier comité de soutien à la candidature de Jean-Louis Borloo.

Au-delà du Parti radical, l'idée de Jean-Louis Borloo est de constituer une "alliance républicaine, écologiste et sociale" avec les autres composantes de "l'aile humaniste" de la majorité de droite, notamment le Nouveau centre d'Hervé Morin et la Gauche moderne de Jean-Marie Bockel.

"Il s'agirait, d'une certaine façon, de recréer l'UDF et de faire à nouveau marcher la droite sur deux jambes", décrypte le politologue Gérard Grunberg dans une note pour le groupe de réflexion Telos. Entre 1978 et 1998, la droite française était en effet partagée entre le RPR, néogaulliste et chiraquien, et l'UDF, union de ses sensibilités libérale, démocrate-chrétienne et radicale.

Or, la création de l'UMP fut la conséquence de l'effacement des antagonismes idéologiques entre les deux partenaires, étant donné le ralliement de la majorité du RPR aux idées libérale, européiste et décentralisatrice de l'UDF. Mais, aujourd'hui, l'insistance de Nicolas Sarkozy sur les thématiques d'identité, d'immigration et de sécurité a fait renaître un clivage à droite, Jean-Louis Borloo allant jusqu'à affirmer dans le contexte des élections cantonales qu'il y avait désormais "deux majorités présidentielles".

"La diversité historique de la droite française ne pouvait pas disparaître avec la création de l’UMP. Celle-ci devait donc faire vivre, organiser et canaliser cette diversité, poursuit Gérard Grunberg. Sa direction n’a pas su ou voulu le faire." Alain Juppé puis Nicolas Sarkozy, ses deux présidents successifs, n'ont en effet jamais appliqué les statuts du parti, qui prévoient bien la reconnaissance de courants internes (appelés "mouvements") avec vote des adhérents et financement propre.

Reste à savoir jusqu'où la prise d'indépendance de Jean-Louis Borloo pourra ébranler l'UMP. Les ex-UDF non radicaux (Pierre Méhaignerie, Marc-Philippe Daubresse) devaient en effet se réunir ce mardi afin de réaffirmer leur appartenance au parti majoritaire, tout au moins jusqu'aux législatives. Et, au sein même du Parti radical, un député pourtant favorable à la candidature de Jean-Louis Borloo estime que pas plus de "cinq ou six" de ses collègues (sur vingt au total) souhaitent véritablement rompre avec l'UMP…

Laurent de Boissieu
La Croix, 12/04/2011 (version légèrement modifiée)

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