Mariage pour tous: jusqu'où les opposants peuvent-ils s'opposer? (21 mai 2013)

La loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe a été promulguée le 18 mai 2013 au Journal Officiel de la République française.

Jusqu'où les anti-"mariage pour tous" peuvent-ils maintenant s'y opposer?

 

1. Liberté d'opinion et d'expression

Les anti-"mariage pour tous" peuvent bien entendu continuer à manifester pour demander la révision ou l'abrogation de la loi Taubira, de même que les partis politiques d'opposition peuvent inscrire l'une ou l'autre de ces options dans leur programme pour les échéances électorales de 2017 (ce qui promet de vifs débats internes à l'UMP...).

Bruno Le Maire est donc complètement à côté de la plaque lorsqu'il explique qu'il n'ira pas manifester le 26 mai, contrairement à d'autres députés UMP, car "nous n'avons pas, nous parlementaires, à aller défiler contre une loi qui a été adoptée au Parlement" (La Nouvelle Édition, Canal+, 20/05/2013).

 

2. Respect et application de la loi

Promulguée, la loi devient la loi de la République et s'impose à tous.

Certains opposants mettent toutefois en avant leur "devoir de résistance" ou de "désobéissance civile" face à une loi "légale mais illégitime", "injuste" ou "amorale".

Ces principes ne me semblent toutefois pas applicables dans un État de droit démocratique comme la France: il ne peut y avoir "résistance" que face à l'occupation de son territoire national ou face au renversement de l'ordre démocratique et à la tyrannie (résistance à l'oppression) [lire ci-dessous: "Dictature socialiste?"].

Sinon, chaque individu pourrait décréter que telle ou telle loi s'oppose à sa conscience et donc s'y soustraire dans une chienlit généralisée. Je le disais hier au sujet des "gauchos" ou des "bobos" qui aident des étrangers en situation irrégulière, je le dis aujourd'hui au sujet des "fachos" qui soutiennent les municipalités* prétendant ne pas marier les couples de personnes de même sexe (et je ne parle même pas de l'inhumanité crasse de ceux qui entendent troubler les mariages homosexuels).

Si "résistance" il devait y avoir de nos jours, ce serait bien plus contre les traités européens qui limitent notre souveraineté (et donc la portée et le champ de l'alternance) que contre une loi qu'il suffirait demain à une autre majorité démocratique (si elle en a l'envie et la volonté politique) de réviser ou d'abroger.

 

* Le maire peut être représenté lors de la célébration du mariage par un de ses adjoints, mais ce dernier agit de toute façon en son nom.

 

***

Dictature socialiste?

Certains militants de droite ont de fait "pété les plombs" depuis l'élection à la présidence de la République de François Hollande, remettant hier en cause sa légitimité et parlant aujourd'hui de "dictature socialiste" (thématique apparue sur la question fiscale).

C'est là qu'une jonction s'est récemment opérée avec une partie de l'extrême droite autour de l'opposition au "mariage pour tous". Non pas en raison de la présence dans le même cortège d'élus FN et UMP ou UDI. Mais, à la base, dans la convergence entre des militants de l'aile droite de l'UMP et des groupes extrémistes comme Civitas (1) ou "Les Identitaires".

Ces derniers, très doués dans l'art de la communication et de l'action politiques, sont à l'origine de la campagne "Pas mon président", qu'ils viennent opportunément de relancer.

"Les Identitaires" sont ainsi parvenus à apparaître comme plus fréquentables que le FN, alors qu'ils représentent en réalité une extrême droite radicale, ouvertement islamophobe et racialiste (2). Quoi qu'il en soit, ils feront je pense partie de ceux qui bénéficieront sur le terrain, à terme, de la mobilisation contre le "mariage pour tous".

 

(1) Avec comme figures de proue Vivien Hoch, militant des Jeunes Actifs de la 2e circonscription de Paris et signataire en 2012 de l'appel des Trentenaires pour François Fillon, et Andrea Papus Ngombet Malewa, élu en octobre 2010 dans la 6e circonscription au comité départemental de la fédération de Paris.

(2) J'écris bien "racialiste" (= politique de différentiation raciale) et non "raciste" (= politique de différentiation ET de hiérarchisation raciales). Sur le sujet: Identitaires et diversitaires, les deux faces du racialisme différentialiste.

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