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15 décembre 2013

Ce que dit la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires

La question soulevée par la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires n'est pas celle de la reconnaissance des langues régionales, déjà mentionnées dans la Constitution, mais celle de la reconnaissance des locuteurs de ces langues régionales comme des minorités infra-citoyennes avec des droits spécifiques.

 

Le premier ministre Jean-Marc Ayrault a annoncé, vendredi 14 décembre, en signant le contrat de projets État-région Bretagne 2014-2020 (dit "Pacte d'avenir pour la Bretagne"), que le gouvernement va inscrire à l'ordre du jour prioritaire de l'Assemblée Nationale une proposition de loi constitutionnelle tendant à ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

Cette ratification figurait il est vrai dans le projet présidentiel du président de la République François Hollande. Plusieurs propositions de loi ont en outre été récemment déposées dans ce sens par des députés écologistes (4 novembre), socialistes (10 décembre) et radicaux de gauche (13 décembre).

 

Il convient toutefois de ne pas se méprendre sur la signification de cette convention du Conseil de l'Europe (signée par la France le 7 mai 1999 mais jamais ratifiée depuis). Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si en France on insiste sur le "langues régionales" en faisant l'impasse sur le "langues minoritaires".

Cette charte n'a en effet pas pour objet de reconnaître les langues régionales ou de promouvoir le patrimoine linguistique français. Ça c'est la surface, ce qu'on va sans doute faire croire à nos compatriotes pour leur imposer cette véritable révolution juridique, politique et philosophique. D'autant plus que la Constitution dispose depuis 2008 que "les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France" (curieuse mention, car il serait bien laborieux d'y lister tout ce qui appartient au patrimoine de la nation!).

 

En réalité, cette charte a pour objet de permettre la reconnaissance de minorités (ou "groupes" de locuteurs à l'intérieur des "territoires" dans lesquels ces langues régionales sont pratiquées) jouissant de droits collectifs, notamment le "droit imprescriptible" de pratiquer une langue régionale ou minoritaire non seulement dans la "vie privée" (ce qui est bien entendu le cas actuellement!) mais également dans la "vie publique", c'est-à-dire entre autres dans les relations avec les administrations et les services publics.

Le Conseil constitutionnel a donc logiquement jugé qu'une telle reconnaissance de minorités linguistiques porterait "atteinte aux principes d'indivisibilité de la République, d'égalité devant la loi et d'unicité du peuple français" (d'où la nécessité de réviser la Constitution avant ratification). Des principes jacobins qui ont leurs farouches adversaires et partisans dans toutes les formations politiques, aussi bien à droite qu'à gauche.

L'actuelle majorité peut parfaitement considérer que ces principes issus de la Révolution française sont dépassés (ce qui irait de pair avec l'abandon de la laïcité et de l'assimilation républicaine, envisagé le même jour dans un rapport remis au même Jean-Marc Ayrault). Mais, par honnêteté intellectuelle et par transparence démocratique, il faudrait juste qu'elle l'assume publiquement.

 

 

[Ajout 21/01/2014. La proposition de loi déposée par le groupe socialiste (Bruno Le Roux, Jean-Jacques Urvoas) tente un numéro d'équilibrisme juridique: ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires sans aboutir à la reconnaissance de minorités linguistiques.

Comment? En constitutionnalisant, parallèlement à cette ratification, des extraits de la déclaration interprétative (unilatéralement consignée par la France lors de la signature de la Charte, mais sans aucun effet juridique en droit international):

La République peut ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires adoptée à Strasbourg le 5 novembre 1992, complétée par la déclaration interprétative exposant que:
1. l'emploi du terme de "groupes" de locuteurs dans la partie II de la Charte ne conférant pas de droits collectifs pour les locuteurs des langues régionales ou minoritaires, le Gouvernement de la République interprète la Charte dans un sens compatible avec le Préambule de la Constitution, qui assure l'égalité de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion, et que:
2. l'article 7-1, paragraphe d, et les articles 9 et 10 de la Charte posent un principe général n'allant pas à l'encontre de l'article 2 de la Constitution selon lequel l'usage du français s'impose aux personnes morales de droit public et aux personnes de droit privé dans l'exercice d'une mission de service public, ainsi qu'aux usagers dans leurs relations avec les administrations et services publics.

Bref, cette constitutionnalisation annulerait l'objet-même de la Charte: reconnaître à des minorités linguistiques le "droit imprescriptible" de "pratiquer une langue régionale ou minoritaire dans la vie privée et publique" (préambule). Un texte dont il ne resterait alors pour l'essentiel qu'un simple encouragement et développement de ce qui existe déjà en France (enseignement facultatif, émissions du service public audiovisuel en langues régionales...).]

 

 

Liens:

Constitution (1958)

Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (1992)

Ordonnance de Villers-Cotterêts (François Ier, 1539)

Rapport sur la nécessité et les moyens d'anéantir les patois et d'universaliser l'usage de la langue française (Henri Grégoire, 1794)

 

 

Outil de propagande (ci-dessous), visant à faire croire qu'il s'agit du droit de parler une langue régionale "en public", alors qu'il s'agirait de pouvoir parler une langue régionale ou minoritaire dans la vie publique, c'est-à-dire que l'usage du français ne s'imposerait plus aux personnes morales de droit public et aux personnes de droit privé dans l'exercice d'une mission de service public, ainsi qu'aux usagers dans leurs relations avec les administrations et services public (une autre affiche proclame plus clairement: "Personne ne devrait être surpris si nous utilisons notre langue dans la vie publique, même si nous maîtrisons aussi la langue nationale").

chartelangues.png

13 décembre 2013

Rattachement financier des parlementaires: les gagnants et les perdants

Le Sénat et l'Assemblée nationale viennent de publier le rattachement financier des parlementaires pour 2014 (rappel: chaque année, sénateurs et députés déclarent au bureau de leur assemblée leur rattachement à un parti politique pour la seconde fraction du financement public - un parlementaire rapporte un peu plus de 41.600 euros).

 

Partis politiques, les perdants et les gagnants:

  AN
2012
SÉNAT
2012
TOTAL
2012
AN
2013
SÉNAT
2013
TOTAL
2013
AN SÉNAT TOTAL
PS 292 125 417 289 126 415 -3 1 -2
UMP 191 124 315 198 125 323 7 1 8
URCID 16 20 36 17 20 37 1 0 1
EELV 17 12 29 17 12 29 0 0 0
PRG 13 14 27 13 15 28 0 1 1
PCF 7 19 26 8 19 27 1 0 1
NC-PSLE 7 7 14 7 7 14 0 0 0
DLR 2   2 6 4 10 4 4 8
CPF 1 8 9 1 8 9 0 0 0
TH 3 1 4 3 1 4 0 0 0
PPM 1 2 3 1 2 3 0 0 0
R-UMP   3 3   3 3 0 0 0
DR 4 2 6 2   2 -2 -2 -4
FG 3   3 2   2 -1 0 -1
CE 2   2 2   2 0 0 0
FN 2   2 2   2 0 0 0
GUSR 1 1 2 1 1 2 0 0 0
MIM 2   2 2   2 0 0 0
CSA 1   1 1   1 0 0 0
LPA 1   1 1   1 0 0 0
PCG 1   1 1   1 0 0 0
PCR   1 1   1 1 0 0 0
PLR 1   1 1   1 0 0 0
TAVINI   1 1   1 1 0 0 0
RDM       1   1 1 0 1
IFMOM 3 2 5     0 -3 -2 -5
LT-NEHNA   1 1     0 0 -1 -1
MIP 1   1     0 -1 0 -1
PSG 1   1     0 -1 0 -1
Non rattachés 1 4 5 1 3 4 0 -1 -1
  574 347 921 577 348 925 3 1 4

 

 

Les parlementaires ayant changé de rattachement financier:

  Groupe
2012
Rattachement
2012
Groupe
2013
Rattachement
2013
Motif
Bompard Jacques AN NI DR NI DLR J
Decool Jean-Pierre AN RUMP-app. DR UMP-app. DLR J
Masson Jean Louis SÉNAT NI DR NI DLR J
Türk Alex SÉNAT NI DR NI DLR J
Leroy Maurice AN UDI DR UDI DLR J
Besse Véronique AN NI IFMOM NI DLR J
Bourdouleix Gilles AN UDI IFMOM NI DLR J
Darniche Philippe SÉNAT NI IFMOM NI DLR J
Chevènement Jean-Pierre SÉNAT RDSE CPF RDSE DLR P
Luca Lionnel AN UMP DLR UMP UMP P
Moreau Yannick AN NI IFMOM UMP UMP C
Scellier François AN UMP-app. URCID UMP-app. UMP P
Husson Jean-François SÉNAT NI LT-NEHNA UMP-ratt. UMP P
Piron Michel AN RUMP UMP UDI URCID C
Pozzo di Borgo Yves SÉNAT UDI-UC IFMOM UDI-UC CPF J/P
Serville Gabriel AN GDR PSG GDR DR P
Esnol Philippe SÉNAT SOC PS RDSE PRG C
Klès Virginie SÉNAT SOC-app. Non rattaché SOC PS P
Dolez Marc AN GDR FG GDR PCF C
Azerot Bruno Nestor AN GDR MIP GDR RDM P

C: parlementaires ayant changé de parti politique, donc de rattachement financier.

P: parlementaires ayant changé de rattachement financier pour des raisons personnelles, sans changer de parti politique

J: conséquence des nouvelles dispositions juridiques sur le financement des partis et groupements politiques (cf. ci-dessous)

(les autres changements sont la conséquence des entrées et sorties de parlementaires, notamment des élections législatives partielles)

 

Debout la République (DLR)

Les parlementaires élus en métropole ne peuvent cette année plus se rattacher pour la seconde fraction du financement public à un parti politique d’outre-mer. Cette nouvelle disposition législative met fin aux "micro-partis" créés dans un but exclusivement financier, puisqu'il est plus facile en outre-mer qu'en métropole de remplir les conditions d'obtention du financement public.

C'était le cas de Démocratie et République (DR) de Jean-Louis Masson (sénateur de la Moselle) et des Indépendants de la France de Métropole et d'Outre-Mer (IFMOM) de Gilles Bourdouleix (député et maire de Cholet en Maine-et-Loire).

Debout la République (DLR) de Nicolas Dupont-Aignan, ancien candidat à l'élection présidentielle, est donc financièrement devenu la structure d'accueil des députés et sénateurs qui s'étaient rattachés l'année dernière à ces deux partis (seul Démocratie et République subsiste comme structure financière de députés divers gauche d'outre-mer).

Ce rattachement n'est cependant pas sans soulever des questions.

D'une part, DLR est un vrai parti, avec un projet politique, et non une simple structure financière.

D'autre part, DLR est un parti d'inspiration gaulliste, à la croisée de la gauche républicaine et de la droite souverainiste. Bref, il est politiquement cohérent que Nicolas Dupont-Aignan apporte une aide technique à des partis issus de ces deux courants, comme le MRC (Jean-Pierre Chevènement) ou le MPF (Philippe Darniche, Véronique Besse).

Le rattachement de Jacques Bompard, député d'extrême droite (Ligue du Sud), semble en revanche incohérent voire même paradoxal.

Idéologiquement très proche de la ligne (im)portée par Florian Philippot au sein du FN, Nicolas Dupont-Aignan ne veut en effet pas rejoindre le Rassemblement Bleu Marine en raison de la persistance de la ligne FN "canal historique" représentée par Marion Maréchal Le Pen, Jean-Marie Le Pen ou Bruno Gollnisch. Or, l'ex-FN Jacques Bompard se rattache également à ce courant, voire pire puisqu'il est aussi proche de la mouvance régionaliste identitaire, c'est-à-dire aux antipodes du républicanisme de Nicolas Dupont-Aignan.

Bref, cet accord financier, d'apparence strictement technique, vient en réalité brouiller le message politique de DLR.

 

 

Rappel: Aides publiques directes attribuées aux partis et groupements politiques pour 2013

 

10 décembre 2013

Droite: 7 villes où les négociations municipales coincent

Résumé en tableau, afin d'illustrer mon article La droite négocie âprement en vue des municipales:

 

Marseille
UMP UDI MoDem  
Jean-Claude Gaudin (UMP) Jean-Luc Bennahmias

 

Toulouse
  UDI MoDem UMP
Christine de Veyrac Jean-Luc Moudenc (UMP)

 

Strasbourg
UMP UDI MoDem  
Fabienne Keller François Loos (décision en attente)

 

Angers
  UDI MoDem UMP
Laurent Gérault Christophe Béchu (UMP)

 

Rouen
UMP UDI MoDem  
Jean-François Bures Patrick Chabert (UMP-UDI-MoDem)

 

Caen
UMP UDI MoDem  
Joël Bruneau Sonia de la Provôté (UDI)

 

Pau
UMP UDI MoDem  
Éric Saubatte François Bayrou (MoDem)

 

Par ailleurs, dans plusieurs villes (Lyon, Lille, Dijon, Mulhouse...) des adhérents du MoDem figureront sur les listes PS, mais à titre de ralliement individuel, sans l'étiquette MoDem.