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19 juin 2007

Bayrou, isolé mais content

445a9923239844f5af7b6b2f8caecae1.jpgAvant l'élection présidentielle, François Bayrou présidait le troisième parti de l'Assemblée nationale en effectifs, disposant de son propre groupe parlementaire, ce qui lui offrait une tribune et des moyens financiers et matériels. Il préside désormais le sixième parti dans l'Assemblée nationale élue dimanche, derrière l'UMP (319), le PS (191), le Nouveau Centre (21), le PCF (16 et un apparenté) et le PRG (8). Avec cinq élus, le MoDem est en outre loin des vingt élus nécessaires pour constituer un groupe parlementaire.

Dimanche soir, depuis sa circonscription des Pyrénées-Atlantiques, François Bayrou a toutefois trouvé des sujets de satisfaction. Tout d'abord, sa réélection, avec 61,21 % des suffrages exprimés contre 55,58% en 2002. Ensuite, celle de son ami Jean Lassalle dans la seule triangulaire du second tour, face aux candidats de l'UMP et du PS. Au total, sur les sept circonscriptions où le MoDem était au second tour, cinq candidats du nouveau parti ont été élus. Dans le détail, la situation est toutefois plus complexe. Deux d'entre eux, Jean-Christophe Lagarde (Seine-Saint-Denis, 5e) et Thierry Benoît (Ille-et-Vilaine, 6e), bien qu'investis par le MoDem, ont fait campagne sous une autre étiquette et semblent très proches du Nouveau Centre de la majorité présidentielle. Avec 21 élus, ce dernier réussit son pari : succéder à l'UDF au centre droit en formant un groupe parlementaire allié mais distinct de l'UMP.

Le cinquième élu du MoDem est Abdoulatifou Aly, membre du courant Force de l'alternance du Mouvement départementaliste mahorais. Il a rejoint le MoDem entre les deux tours des législatives, le parti de François Bayrou ayant originellement investi Daroussi Zainadini, non qualifié au second tour, membre d'un autre courant du Mouvement départementaliste mahorais. Enfin, les deux candidats du MoDem battus au second tour sont Élisabeth Doineau (48,20% dans la 2e circonscription de la Mayenne) et Jean-Marie Cavada (45,77% dans la 1re circonscription du Val-de-Marne).

"Nous allons représenter à l'Assemblée nationale tous ceux qui en sont injustement écartés, a expliqué François Bayrou. Qui ont leur place et à qui le mode de scrutin ne donne pas la représentation à laquelle auraient droit tous les citoyens français. Nous allons représenter ce pluralisme et cette diversité pour trouver un jour un meilleur équilibre dans notre pays." En réalité, seuls les partis extrémistes (FN, LO, LCR) ne sont pas représentés à l'Assemblée nationale. Quoi qu'il en soit, François Bayrou entend donc plus que jamais "construire" le "grand courant politique dont la France a besoin" : "On voit ce soir qu'il peut gagner, y compris au scrutin majoritaire, a-t-il ajouté. Il gagnera d'autant mieux quand les scrutins seront plus justes." En vigueur aux élections législatives, le scrutin uninominal majoritaire à deux tours est en effet le pire pour une force politique souhaitant incarner une troisième voie indépendante des blocs de droite et de gauche.

Il n'en reste pas moins que le MoDem a joué dans ces législatives un rôle plus important que le nombre de ses élus peut le laisser penser. En insistant, dans l'entre-deux-tours, sur la "défense du pluralisme", François Bayrou et ses proches ont, de fait, donné un coup de pouce à la gauche. Contrairement à l'UDF, positionnée au centre droit, le MoDem s'arrime donc au centre gauche. Mais il faudra certainement attendre l'entre-deux-tours des prochaines municipales pour savoir si François Bayrou en tirera ou non toutes les conséquences en termes d'alliance.

 

Laurent de Boissieu

© La Croix, 19/06/2007

14 juin 2007

Géographie électorale

quelques cartes sur l'élection présidentielle :

 

l'évolution du vote d'extrême droite :

http://francepolitique.free.fr/PFN3.htm

 

l'évolution du vote communiste :

http://francepolitique.free.fr/PPCF3.htm

 

le vote Bayrou en 2002 et 2007 comparés au vote Lecanuet en 1965 :

http://francepolitique.free.fr/centre.htm

 

13 juin 2007

Les candidats du MoDem adoptent des positions divergentes pour le second tour

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Comme dans l'entre-deux-tours de l'élection présidentielle, les centristes se trouvent confrontés au choix entre la droite et la gauche, à l'exception bien entendu des six circonscriptions où des candidats du MoDem sont encore en lice. "Nous sommes indépendants, a martelé hier François Bayrou sur RTL. Il n'y a pas besoin de négociation avec le Parti socialiste. Il n'y a pas besoin de négociation avec l'UMP." Ajoutant, comme le 25 avril dernier : "Je ne donnerai pas de consigne de vote."

Autant il avait laissé entendre durant la campagne présidentielle que la balance penchait en faveur de Ségolène Royal ("Je ne voterai pas pour Sarkozy"), autant se garde-t-il bien, aujourd'hui, de marquer sa préférence pour l'un ou l'autre bloc. "Je n'ai pas rappelé Ségolène Royal", a-t-il ainsi indiqué à propos du message que lui a laissé, lundi, l'ex-candidate. "Non pas par manque de respect mais pour éviter toute ambiguïté, a-t-il expliqué. Parce que, évidemment, si j'avais appelé Ségolène Royal (...), on aurait cru que j'entamais un processus destiné à faire en sorte que le PS et le MoDem se retrouvent pour cette élection." La décision, hier, de l'UMP de retirer son candidat face à François Bayrou dans la 2e circonscription des Pyrénées-Atlantiques, ne l'a pas non plus incité à se rapprocher de ses anciens alliés de droite.

Localement, les candidats du MoDem éliminés ont adopté des positions divergentes. Il y a, d'abord, ceux qui, comme François Bayrou, se positionnent à équidistance de la droite et de la gauche. "Les électeurs ont voté pour moi parce que je suis indépendant et responsable, je les considère eux aussi comme responsables et indépendants, souligne ainsi Jean-François Pernin (Paris, 8e circonscription). Je leur laisse donc la liberté de vote pour le second tour."

Il y a, ensuite, ceux qui adoptent une attitude proche de celle de François Bayrou à la présidentielle : pas de consigne de vote, mais un penchant pour la gauche. "Je sais que les électeurs qui ont choisi les candidats du MoDem exerceront leur jugement pour choisir leur futur député en fonction des deux critères qui me paraissent les plus justes : la personnalité des candidats et la défense du pluralisme", plaide Marielle de Sarnez (Paris, 11e). L'expression "défense du pluralisme" permettant au MoDem et au PS de marquer leur préférence réciproque face à un candidat UMP. Lundi, le premier secrétaire du PS, François Hollande, avait déjà appelé les électeurs de son parti à "favoriser le pluralisme" dans les trois circonscriptions où l'UMP et le MoDem s'affrontent.

Dans l'Isère, le MoDem a, en outre, appelé "à faire battre tout candidat condamné par la justice", ce qui vise l'ancien maire de Grenoble Alain Carignon (UMP). D'autres candidats sont allés plus loin, comme l'ancien ministre Azouz Begag (Rhône, 3e) ou l'ex-PRG Richard Morales (Rhône, 6e), qui ont appelé à voter pour le candidat PS.

Enfin, il y a ceux qui, au contraire, voteront UMP. "Dans le respect du choix de chacun, nous appelons pour notre part à un rassemblement autour du candidat de la majorité parlementaire telle que la veulent les Français", indiquent dans un communiqué Thierry Cornillet (Drôme, 2e) et son suppléant, Claude Aurias. Sans donner de consigne de vote, Michel Canévet (Finistère, 7e) précise, lui aussi, qu'il votera "à titre personnel pour la députée sortante UMP", Hélène Tanguy. Michel Canévet est le seul candidat MoDem qui, pouvant se maintenir au second tour, a décidé de se retirer. Dans la même situation en 2002, le candidat UDF s'était alors désisté en faveur de l'UMP.

Outre ces divergences, des critiques ont déjà commencé à se faire entendre au sein du nouveau parti. Didier Bariani, président du groupe UDF-MoDem au Conseil de Paris, et Jean-Christophe Lagarde, qualifié pour le second tour dans la 5e circonscription de Seine-Saint-Denis, reprochant à François Bayrou de s'intéresser trop au centre gauche et de délaisser le centre droit.

 

Laurent de Boissieu

© La Croix, 13/06/2007

12 juin 2007

Le MoDem ne parvient pas à enrayer la bipolarisation de la vie politique

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Le Mouvement démocrate (MoDem), créé par François Bayrou dans la foulée du premier tour de l'élection présidentielle, savait que son baptême du feu électoral serait un mauvais moment à passer.

D'une part, la logique du scrutin uninominal majoritaire à deux tours induit des alliances pour le second. L'exemple du FN ayant montré qu'il est quasi impossible, sans alliance, pour un tiers parti de faire élire un député en cas de triangulaire.

D'autre part, si François Bayrou est parvenu à se hisser à la troisième place de l'élection présidentielle avec 18,57% des suffrages exprimés, cela ne fait que 15,34% des électeurs inscrits. Or, aux législatives, un candidat doit obtenir 12,5% des inscrits pour se qualifier au second tour. Avec une participation bien moindre qu'au premier tour de la présidentielle (60,42% contre 83,77%), ce seuil est d'autant plus difficile à atteindre.

La situation est toutefois pire que prévu. Au moins, fort des 6,8 millions d'électeurs de François Bayrou à la présidentielle, le MoDem pouvait-il espérer maintenir la pression en se qualifiant pour le second tour dans de nombreuses circonscriptions. Peine perdue : de nombreux ténors du MoDem n'ont pas franchi 12,5% des inscrits. À commencer par les parlementaires européens Marielle de Sarnez (11,91% dans la 11e circonscription de Paris) et Bernard Lehideux (9,02%, 8e des Hauts-de-Seine) ou les députés sortants Anne-Marie Comparini (10,08%, 1re du Rhône) et Gilles Artigues (11,14%, 1re de la Loire).

Avec 37,25% des suffrages exprimés, François Bayrou devance dans la 2e circonscription des Pyrénées-Atlantiques les candidats UMP (Jean-Pierre Marine, 25,92%) et PS (Marie-Pierre Cabanne, 23,32%). Sur le papier, le MoDem peut participer à deux autres triangulaires. Dans la 7e circonscription du Finistère, Michel Canévet a toutefois annoncé son retrait sans donner de consigne de vote. Reste donc la 4e circonscription des Pyrénées-Atlantiques, où Jean Lassalle a été distancé par l'UMP (Hervé Lucbereilh, 31,36%) mais devance le PS (Jean-Pierre Domecq, 19,86%). En 2002, il avait été élu après le retrait de l'UMP.

Dans trois autres circonscriptions, le candidat MoDem affrontera au second tour l'UMP : Jean-Marie Cavada (22,27%) face à Henri Plagnol (44,40%) dans la 1re du Val-de-Marne, Thierry Benoît (20,21%) face à Marie-Thérèse Boisseau (37,25%) dans la 6e d'Ille-et-Vilaine, et Élisabeth Doineau (19,35%) face à Marc Bernier (43,26%, avec une bonne réserve de voix à droite) dans la 2e de la Mayenne. Il y a enfin le cas particulier de Jean-Christophe Lagarde, dont l'étiquette MoDem ne figurait pas sur les documents électoraux. Avec 45,95 %, le maire de Drancy est en ballottage favorable dans la 5e circonscription de Seine-Saint-Denis face au PCF (Abdel Sadi, 20,28%).

Même si Ségolène Royal a laissé un message téléphonique à François Bayrou, François Hollande a exclu, hier, de retirer son candidat face à Jean Lassalle. Pour les trois duels UMP-MoDem, le premier secrétaire du PS a toutefois appelé les électeurs de son parti à "favoriser le pluralisme". En clair : à voter MoDem. Symétriquement, l'ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin et le secrétaire général délégué de l'UMP, Patrick Devedjian, ont affirmé, hier également, vouloir "tendre la main" à François Bayrou.

Reste à savoir quelle sera, entre les deux tours, l'attitude des candidats du MoDem.

 

Laurent de Boissieu

© La Croix, 11-12/06/2007

08 juin 2007

Au centre, deux partis se disputent les électeurs

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Une page s'est tournée dans l'histoire politique française. Depuis 1978, la droite était constituée de deux pôles. D'un côté, les chiraquiens du RPR. De l'autre, l'UDF, giscardienne à sa création, puis successivement barriste (1988), balladurienne (1995) et bayrouiste (2002). Déjà affaiblie par une scission en 1998 (Alain Madelin et Démocratie libérale) et par la dissidence de nombreux élus en 2002 (Pierre Méhaignerie, Jacques Barrot, Philippe Douste-Blazy, Hervé de Charette), l'UDF n'aura pas survécu à l'élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République.

Tout s'est joué dans la semaine suivant le second tour de la présidentielle. Le 9 mai, 22 des 24 députés UDF qui avaient voté pour Nicolas Sarkozy au second tour signent, dans Le Figaro, une tribune intitulée "Pour un centre libre dans la majorité présidentielle". "Tout en conservant notre autonomie au Parlement, et sans intégrer l'UMP, nous inscrivons sans hésitation notre démarche dans la majorité présidentielle qui se dessine", écrivent les signataires.

Le lendemain, François Bayrou convoque un conseil national de l'UDF. À une très large majorité, les conseillers nationaux approuvent la création du Mouvement démocrate. "Je ne quitterai pas l'allégeance de l'un pour me réfugier dans celle de l'autre", affirme François Bayrou, l'homme qui a progressivement détaché le centre de la droite. Un positionnement qui vaut au nouveau parti l'adhésion du parti écologiste CAP 21, créé par l'ancienne ministre Corinne Lepage, et de dissidents des Verts comme Jean-Luc Bennahmias, ancien secrétaire national du parti (1997-2001), ou Danièle Auffray, adjointe au maire de Paris. Finalement, le MoDem investit 545 candidats aux élections législatives (sur 577 circonscriptions).

Parallèlement, Hervé Morin, président du groupe UDF dans l'Assemblée nationale sortante et nouveau ministre de la défense, parvient, pour la date limite du 18 mai, à présenter 80 candidats sous l'étiquette provisoire "Parti social libéral européen", en mobilisant parfois des collaborateurs, des amis et des membres de sa famille. Pour bénéficier du financement public, un parti doit en effet présenter des candidats ayant obtenu chacun au moins 1% des suffrages exprimés dans au moins 50 circonscriptions, le montant de l'aide dépendant ensuite du nombre de voix obtenues au premier tour des législatives et du nombre de parlementaires. Le 29 mai, Hervé Morin, entouré de François Sauvadet et d'André Santini, annonce officiellement la création d'un nouveau parti : le Nouveau Centre. En ne parvenant toutefois à réunir que 17 députés UDF sortants soutenant la majorité présidentielle.

Finalement, le centre est actuellement composé de toute une palette allant des ex-UDF investis par l'UMP (Pierre-Christophe Baguet) aux ex-UDF investis par le MoDem (François Bayrou), en passant par le Nouveau Centre dans la majorité présidentielle (Hervé Morin), sans oublier la catégorie particulière des candidats du MoDem se réclamant... de la majorité présidentielle (Jean-Loup Metton) ! Une situation qui se clarifiera certainement après les législatives.

 

Laurent de Boissieu

© La Croix, 08/06/2007