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14 septembre 2009

La loi ne sera plus la loi

À l'occasion de la convocation à partir de ce lundi du Parlement en session extraordinaire, les députés examinent aujourd'hui et demain le projet de loi organique relatif à l'application  de l'article 61-1 de la Constitution, issu de la révision de juillet 2008 :

Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé.

 

Concrètement, il s'agit d'ouvrir un droit nouveau pour les justiciables, qui pourront saisir le Conseil constitutionnel à l'occasion d'un procès - ce que les juristes appellent la question préjudicielle de constitutionnalité.

 

Ce qui ressemble naïvement à une avancée pour la protection des libertés et un progrès de l'État de droit risque en réalité d'être la source d'une importante insécurité juridique.

 

Jusque-là, le Conseil constitutionnel - saisi par le président de la République, le Premier ministre, le président de l'Assemblée nationale, le président du Sénat, soixante députés ou soixante sénateurs (ouvrant cette saisine à l'opposition parlementaire) - statuait sur la constitutionnalité d'une loi a priori, c'est-à-dire avant sa promulgation.

 

Or, ouvrir un contrôle de constitutionnalité des lois a posteriori, c'est :

- désacraliser l'autorité de la loi.

- rompre l'égalité entre justiciables : certains d'entre eux auront été jugés voire condamnés au regard d'un loi ensuite déclarée inconstitutionnelle !

08 avril 2009

Des interventions de Nicolas Sarkozy devront être prises en compte par le CSA

2108869400.jpgLe Conseil d'État a annulé, aujourd'hui, le refus de principe du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel (CSA) de prendre en compte le temps de parole du président de la République et de ses collaborateurs (qui n'ont effectivement jamais été aussi médiatiquement présents que depuis l'élection de Nicolas Sarkozy).

Contrairement aux conclusions du rapporteur public, Catherine de Salins, le Conseil d'État n'argumente cependant pas autour de l'idée d'une pratique différente entre Nicolas Sarkozy et ses prédécesseurs à l'Élysée depuis 1958.

 

Voici ce que dit, dans sa décision, la haute juridiction administrative :

1. Rappel du principe : "En raison de la place qui, conformément à la tradition républicaine, est celle du chef de l'État dans l'organisation constitutionnelle des pouvoirs publics et des missions qui lui sont conférées notamment par l’article 5 de la Constitution, le président de la République ne s'exprime pas au nom d'un parti". Conséquence de ce principe : "Son temps de parole dans les médias audiovisuels n'a pas à être pris en compte à ce titre".

2. Limite au principe : "Il n'en résulte pas pour autant, compte tenu du rôle qu'il assume depuis l'entrée en vigueur de la Constitution du 4 octobre 1958 dans la définition des orientations politiques de la Nation, que ses interventions et celles de ses collaborateurs puissent être regardées comme étrangères, par principe et sans aucune distinction selon leur contenu et leur contexte, au débat politique national et, par conséquent, à l'appréciation de l'équilibre à rechercher entre les courants d'opinion politiques". Conséquence de cette limite au principe : "Le CSA ne pouvait, sans méconnaître les normes de valeur constitutionnelle qui s'imposent à lui et la mission que lui a confiée le législateur, exclure toute forme de prise en compte de ces interventions dans l'appréciation du respect du pluralisme politique par les médias audiovisuels".

3. Enfin, le Conseil d'État renvoie au CSA pour déterminer lui-même les règles propres à assurer une présentation équilibrée de l'ensemble du débat politique national en prenant en compte certaines interventions du président de la République.

06 avril 2009

Le temps de parole de Nicolas Sarkozy pourrait être pris en compte par le CSA

chrono.jpgLe Conseil d'État est en passe d'entériner la Ve République "bis", conséquence du quinquennat et de la pratique présidentialiste de Nicolas Sarkozy. Le rapporteur public (ex-commissaire du gouvernement) a en effet recommandé à la haute juridiction administrative d'annuler le refus de principe du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel (CSA) de prendre en compte le temps de parole audiovisuelle du président de la République.

Le CSA veille notamment au respect du pluralisme politique en s'appuyant sur la règle dite des trois tiers : un tiers de temps de parole pour le gouvernement, un tiers pour la majorité parlementaire et un tiers pour l'opposition parlementaire. L'expression du président de la République n'est toutefois pas prise en compte dans ce calcul.

"En raison de la place qui, conformément à la tradition républicaine, est celle du chef de l'État dans l'organisation constitutionnelle des pouvoirs publics, le président de la République ne s'exprime pas au nom d'un parti", avait justifié, en 2005, le Conseil d'État. Cette jurisprudence renvoie à la conception gaulliste du président de la République, "l'Homme de la nation" incarnant "au-dessus des partis" l'existence d'un "arbitrage national".

Or Catherine de Salins, rapporteur public, a estimé, vendredi, devant l'assemblée du contentieux du Conseil d'État, que Nicolas Sarkozy "n'est pas un arbitre, mais un capitaine" (référence au titre d'un ouvrage publié en 1987 par le conseiller d'État Jean Massot). Dorénavant, donc, "la parole du président de la République doit être prise en compte pour le respect du pluralisme politique" puisque "cette conception de son rôle a eu pour conséquence de faire remonter à l'Élysée la gestion des affaires courantes".

Candidat, Nicolas Sarkozy avait d'ailleurs lui-même affirmé qu'à ses yeux "le président de la République n'est pas un arbitre au-dessus des partis, qui marche sur les eaux parce qu'il a été élu". Élu à la présidence de la République, il a effectivement continué à participer épisodiquement aux instances de son parti, l'UMP.

Si le Conseil d'État, qui doit rendre sa décision d'ici une quinzaine de jours, suit les recommandations du rapporteur public, ce qui est généralement le cas, il s'agirait d'une petite victoire pour l'opposition, la haute juridiction administrative ayant été saisie par François Hollande lorsqu'il était premier secrétaire du PS.

 

Laurent de Boissieu

© La Croix, 06/04/2009