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30 novembre 2009

Quand la démocratie dérange...

Après Authueil (sur l'élection du président de la République au suffrage universel direct), c'est au tour de mon confrère Jean Quatremer (sur le référendum) d'attaquer la démocratie :

"Une nouvelle fois la démocratie directe fait la preuve de son extrême dangerosité. En laissant s’exprimer la peur de l'autre, le refus de la rationalité, l'intérêt immédiat, le référendum est décidément un instrument dangereux aux mains des démagogues de tous poils. On comprend mieux pourquoi plusieurs pays démocratiques l'ont tout simplement interdit."

 

Je ne peux que répéter ce que j'ai déjà écrit ici : le principe de la démocratie c'est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. En démocratie, une décision légitime ne peut donc qu'émaner du peuple, directement (référendum) ou indirectement (via l'élection de représentants, au suffrage universel direct ou indirect).

Or, par définition, plus on s'éloigne du suffrage universel direct, plus on s'éloigne de l'idéal de la démocratie. Car en quoi le référendum serait-il davantage "un instrument dangereux aux mains des démagogues de tous poils" que l'élection ? Encore une fois, je vois poindre, depuis Bruxelles, la tentation du despotisme "éclairé"...

 

***

 

Quatremer réagissait au référendum positif, d'initiative populaire, interdisant dans la constitution suisse la construction de minarets.

Plusieurs remarques, en vrac :

- je suis, paradoxalement en apparence, contre le droit d'initiative législative populaire, qui opère pour le coup un glissement entre la démocratie et la dictature de l'opinion/de l'émotion.

- il est halluciant de stigmatiser dans une constitution une religion en posant un interdit architectural : "La construction de minarets est interdite" (nouvel ajout à l'article 72 de la constitution suisse).

- il est tout aussi hallucinant de construire des mosquées (avec ou sans minaret, ce n'est pas le probème) dans un style étranger à un environnement architectural : la question n'est en effet pas de construire des lieux de culte pour l'Islam en France mais de construire des lieux de culte pour les Français de confession musulmane. Idem pour les bouddhistes ou tout autre culte.

 

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Centre bouddhiste Dhagpo Kundreul Ling Le Bost (Puy-de-Dôme)

Commentaires

Cher ami, il faudrait se mettre d'accord sur ce qu'on met sous le mot démocratie !

Pour moi, la démocratie, c'est un système où le peuple décide, en dernier ressort. Il peut plus ou moins déléguer à des représentants qui agissent en son nom. On peut avoir une délégation plus ou moins forte, sans que cela ne soit antidémocratique, à condition que

- les représentants soient élus (même par suffrage indirect) et qu'ils puissent être sanctionnés au renouvèlement suivant.
- Que les décisions importantes soient, à un moment ou un autre, soumises au peuple pour ratification. Cela peut être sur un question précise par référendum, ou globalement lors d'élections générales.

A vous lire, j'ai l'impression que pour vous, en dehors de la démocratie directe, il n'y a pas de vraie démocratie.

Écrit par : authueil | 30 novembre 2009

salut à tous les deux. Oui la démocratie dérange, et surtout les pouvoirs en place lorsque la preuve de leur éloignement du peuple est étalée sur la place publique.

D'ailleurs, l'un comme l'autre, vous pensez que l'islam n'est qu'une religion, alors qu'il s'agit d'une idéologie totalitaire. Il n'y a donc aucune raison de la traiter comme les religion, mais comme une secte, ou un mouvement extrémiste.

Rien n'est plus injuste que de traiter également des choses inégales...

Écrit par : LOmiG | 30 novembre 2009

@authueil : je n'ai pas dit qu'"en dehors de la démocratie directe, il n'y a pas de vraie démocratie", mais j'ai simplement constaté que le suffrage universel indirect est par nature moins - ce qui ne signifie pas qu'il ne le soit pas du tout - démocratique que le suffrage universel direct.
Je rappelle encore une fois ce que j'ai écrit : "En démocratie, une décision légitime ne peut donc qu'émaner du peuple, directement (référendum) ou indirectement (via l'élection de représentants, au suffrage universel direct ou indirect)."

@LOmiG : n'étant pas théologien ou spécialiste de l'islam, je ne saurais dire dans l'absolu si l'islam est une religion ou "une idéologie totalitaire" (sic). Mais je constate empiriquement que des Français de confession musulmane vivent l'islam comme une religion et le pratiquent dans le respect des principes et des lois de la République. C'est donc bien possible (et ce n'est pas à moi de dire si lesdites personnes sont ou non dans les clous d'un islam "véritable").

Écrit par : Laurent de Boissieu | 30 novembre 2009

LOmiG > Savoir si la démocratie "dérange" ou non est un débat à peu près aussi vieux que la théorisation de la dite démocratie.

Par contre, en ce qui concerne l'islam, je ne peux guère vous laisser écrire de telles sottises. Déjà, dire "l'islam" comme s'il s'agissait d'un individu ou d'un groupe cohérent et homogène, c'est limite, mais passons... Je vais vous répondre sur le champ de la théorie et pas de la pratique (ou plutôt des pratiques, innombrables et variées) réelle et actuelle de l'islam.

L'islam aurait du mal à être une idéologie, étant donné qu'il s'agit d'une pensée qui, appliquée au champ politique, amène à considérer qu'il n'y a pas (ou plus) d'histoire, alors que le propre d'une idéologie, c'est de donner un sens à l'histoire, même de manière implicite. En revanche, certaines branches politiques comme spirituelles de l'islam peuvent donner lieu à des idéologies, mais dire que l'islam est une idéologie est une bêtise. Cette confusion fréquente tient à ce que l'islamisme (islam politique) est prégnant dans les sociétés et pays où l'islam est hégémonique et/ou s'est imposé comme religion d'état. C'est sensiblement la même relation entre les pouvoirs spirituel et temporel qui était présente dans les états du pape avant l'unification italienne.

Ensuite, l'islam en soi n'est pas "totalitaire". Certes, comme toute religion, il amène à penser sur différents plans et à différentes échelles, il édicte des dogmes (différents selon les branches spirituelles, et je ne parle pas des différents islamismes, encore plus variés) et/ou des attitudes de vie à ces différentes échelles. Comme tout mouvement se voulant tout à la fois épanouissement spirituel (donc individuel) et modèle social (donc collectif) (c'est-à-dire la plupart des religions et idéologies, à quelques exceptions notables près... je parle là de la théorie, pas de la pratique effective), il cherche par contre à aborder la totalité. Une vision cohérente qui s'étend à tous les domaines et à toutes les échelles, mais pas nécessairement par la coercition (par exemple la branche spirituelle suffi rejette tout investissement forcé des individus dans la société et, partant, toute contrainte autre que morale), en tous cas pas en prétendant régenter la vie des individus en dehors de quelques principes (que l'on peut contester) jugés "bons" pour la paix sociale. Donc l'islam est totalisant, mais pas totalitaire.

En revanche, un aspect de l'islam qui prête à croire à un aspect totalitaire est le discours assez violent des haddiths. Sauf que les haddiths ne sont suivis que par les sunnites (et encore, pas tous, les subdivisions étant ce qu'elles sont...) et qu'en plus elles ne sont pas force de loi, au contraire de la charia (les "principes jugés "bons" pour la paix sociale" mentionnés ci-dessus). Sauf que le totalitarisme n'est pas nécessairement expansionniste et violent.

Bref, l'islam est totalisant, pas totalitaire. Certaines pratiques politiques inspirées de l'islam peuvent l'être, en revanche. Savoir si l'islam en tant que corps doctrinal est un ferment riche pour l'émergence de totalitarismes est un autre débat qui me semble insoluble (il faudrait procéder par comparaisons, je pense... une infinité de comparaisons).

Quant aux assertions gratuites qui qualifient l'islam de "secte" et de "mouvement extrémiste"... Sans commentaire.

Écrit par : Brath-z | 30 novembre 2009

@ Laurent : je ne parle pas de rentrer dans des discussions théologiques, je parle de la définition que donne le dictionnaire et qui montre que l'islam est religieux ET politique, ce qui déjà pose un problème dans un pays laïc. Par ailleurs, je juge sur les résultats de la mise en oeuvre de la charia et sur ce qui se passe quand un pays connait une majorité musulmane. Les sociétés qui s'y développent ne sont pas particulièrement des exemples de sociétés ouvertes et libres. C'est même tout l'inverse.

Écrit par : LOmiG | 30 novembre 2009

Pourquoi l'Europe a-t-elle peur de réaffirmer ses valeurs émancipatrices concernant les femmes? Pourquoi va-t-elle tolérer la burqa le hidjab le niqab, qui prolifèrent sur nos territoires. Ne nous y trompons pas le non au minaret c'est le moyen qu'ont utilisé les suisses pour dire stop, stop à cet Islam là qui transforme nos espaces partagés en annexes des rues yéménites ou Saoudiennes. On veut nous violer de force, nous baillonner. Affirmons haut et fort non à cette condition là de la femme. Les femmes musulmanes méritent autre chose, les migrantes ne doivent pas se voir imposer en Europe le même traitement de ce qu'elles subissent dans les pays islamiques?. C'est auusi ce signal là le vote suisse. Alors nos élites au lieu de voir en chaque suisse un affreux lepèniste devrait écouter, parler entendre les cris étouffés des Suisses mais aussi des autres Européens et surtout des Européennes!!

Écrit par : rataplan | 30 novembre 2009

@ Laurent
Je suis d'accord sur la définition générale de la démocratie.

S'agissant de la votation de nos voisins suisses, je me pose quelques questions dans le billet que j'ai rédigé :
http://lescriptorium.wordpress.com/2009/11/30/les-minarets-de-la-discorde/
Car ce qui est étonnant, c'est que la question posée ne fait référence qu'à un élément architectural. Les citoyens suisses ont-ils simplement voulu préserver leur cadre de vie en y répondant ?

Écrit par : Thierry P. | 30 novembre 2009

@ rantanplan :

Pourquoi dès qu'il est question de l'islam trouve-t-on toujours la référence aux droits des femmes ? Certes, dans la plupart des pays musulmans (pays dont la majorité des habitants est musulmane comme pays dont la religion d'état est l'islam), les conditions des femmes sont déplorables, le carcan religieux pèse extrêmement lourd et elles en sont les premières victimes.

Mais en France ? Le nombre ridiculement bas de femmes portant la burqa ou le niqab, le nombre plus restreint encore de celles qui le portent non pas par affirmation communautaire et/ou volonté de choquer mais par coercition, justifie-t-il un tel alarmisme ? A-t-on vu récemment une recrudescence de l'islamisme au sein des communautés musulmanes ? Si vous disposez d'informations à ce sujet, je vous saurai gré de me les faire parvenir, ça pourrait intéresser des collègues à moi qui étudient la "francité" des populations immigrés du Maghreb de première ou deuxième génération. Parce que jusqu'à présent, ce qui apparaît, c'est une affirmation identitaire... pour réclamer l'intégration en France. De mon point de vue, il faudrait une volonté d'assimilation, mais "on" en a décidé autrement au plus haut sommet de l'état depuis belle lurette.

Alors oui, bien sur, il y a des extrémistes qui rêvent de la Dumma planétaire, il y a des prosélytes qui présentent l'Arabie Saoudite ou le Yémen comme des modèles à suivre, il y en a qui conspuent la France et l' "occident" (un terme que j'abhorre, car il permet tous les raccourcis au détriment de l'histoire et des fondamentaux des relations internationales) et espèrent bien le voir brûler. Honnêtement, ces rares illuminés ne sont pas légion, loin de là. Le danger serait qu'ils essaiment un peu partout, mais apparemment, ils trouvent bien peu d'écho (suffisamment toutefois pour envoyer de jeunes Français se faire exploser en Iraq...). La plupart sont connus des forces de police (qui ne les arrête pas : ce serait en faire des martyrs) et n'ont qu'une influence minime, qui sera selon toute vraisemblance circonscrite voire quasi éliminée d'ici la prochaine génération. Sauf... sauf si d'une manière ou d'une autre, la panne de la "machine à intégrer" se prolonge, faisant s'accumuler la frustration et les tensions, accroissant le communautarisme et faisant courir un grave danger à la République. Mais on en est très loin.

Alors oui, marquer son opposition à ce projet de société prôné par un islamisme wahhabite ou salafiste, tout comme on marque son opposition à un projet racialiste ou communautariste. Mais ne pas prétendre que nous sommes pris en otage (d'autant qu'il y a énormément d'islamismes, et bien plus encore de pratiques religieuses, qui elles pour la plupart séparent nettement la loi révélée de la loi statuée, et dont les principes et pratiques sont tout à fait compatibles avec la République) par les partisans de ce mode de société. Il y en a peut-être moins que de nostalgiques de Pétain ou de puceaux fans du IIIème Reich allemand, ce qui signifie ce que c'est : ultra-marginal.
C'est du ressort des services de sûreté du territoire que d'empêcher ce genre d'énergumènes de nuire. Hurler sans cesse à l'islamisme actuellement présente le même intérêt que hurler au fascisme dans les années 2000 : nul.


Et décidément je fais des commentaires trop longs.

Écrit par : Brath-z | 30 novembre 2009

J'ai bien aimé la dernière remarque qui estvrai que si l'on se mettait à construire des Chapelles en Arabie Saoudite.

Garder une certaine unité architectural, est un argument.

Écrit par : MInaret virtuel | 02 décembre 2009

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