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03 mars 2011

"Bouclier fiscal" et ISF: la droite ment

Petits rappels sur le "bouclier fiscal" version Sarkozy, afin de ne pas tomber dans le piège de la désinformation de droite consistant à faire croire qu'il aurait été instauré en réponse à l'ISF (et donc qu'une suppression réforme du second aurait pour conséquence une abrogation du premier):

 

"L'objectif qui consiste à limiter les prélèvements de l'État à un maximum de 50% doit être considéré comme un minimum. En l'occurrence, il ne s'agit ni d'économie, ni de politique, ni même de fiscalité... mais tout simplement de bon sens. Parce que, enfin, si l'on croit que toute peine mérite salaire et que chacun a le droit de profiter librement de ce qu'il a chèrement acquis, alors on doit se fixer comme règle que jamais la somme des prélèvements de l'État ne dépasse 50% de ce qu'un individu a pu gagner par son travail."
Nicolas Sarkozy, Libre (Robert Laffont/Xo Éditions, 2001)

 

"Poser le principe que nul ne peut se voir confisquer plus de 50% de son revenu par l'impôt direct, y compris la CSG et la CRDS, c'est aussi encourager le travail et la réussite. C'est mettre un terme à une fiscalité confiscatoire."
Nicolas Sarkozy, Ensemble (Xo Éditions, 2007)

 

"L'idée que l'on n'abandonne pas plus de la moitié de ses revenus aux impôts fait partie de la structuration politique et idéologique du quinquennat. La crise exige une priorité en sa faveur, mais rien ne serait pire que de renier des valeurs fondamentales parce qu'il y a la crise."
Claude Guéant, secrétaire général de l'Élysée, cité dans L'Express, 25/03/2009

 

"Je ne toucherai pas au bouclier fiscal car je crois au principe selon lequel on ne peut prendre à quelqu'un plus de la moitié de ce qu'il gagne. Si on laisse passer une exception, comme par exemple la CSG, ce n'est plus un bouclier."
Nicolas Sarkozy, Le Figaro, 15/10/2009

 

Bref, ne voulant pas assumer son renoncement au dogme libéral du "bouclier fiscal" à 50%, la majorité de droite tente de faire croire qu'il aurait été instauré juste pour contrer l'ISF!

Commentaires

Ce matin sur France 2, Michel Rocard vient de revendiquer hautement le "bouclier fiscal à 75% du revenu" qu'il avait instauré en 1988 en même temps qu'il recréait, "sur ordre", l'ISF/IGF supprimé en 1986 par le gouvernement Chirac.

"Bouclier fiscal" n'est pas le terme qu'il a utilisé, car quand, deux minutes plus tard, le journaliste a évoqué le bouclier fiscal actuellement en vigueur, Michel Rocard a dénoncé ce système dans les termes les plus virulents.

J'ai parfois du mal à suivre…

Écrit par : FrédéricLN | 04 mars 2011

FrédéricLN > J'ai moi aussi beaucoup de mal à suivre ces histoires... d'autant que, si ma mémoire ne me trompe pas, en 2007, on parlait de "paquet" fiscal dans la presse, tandis qu'à l'Élysée et à Matignon on essayait d'imposer le terme "bouclier". Les arcanes de la sémantique en politique me sont obscures.

Écrit par : Brath-z | 04 mars 2011

Certains de mes confrères mélangent en effet un peu tout!

1) Le "bouclier fiscal" a été instauré par Jacques Chirac/Dominique de Villepin en 2005 à 60% des revenus, hors CSG et CRDS.
En 2007, Nicolas Sarkozy/François Fillon l'a renforcé à 50% des revenus, CSG et CRDS compris (en réalité 51% depuis la réforme 2010 des retraites).
Or, souvent, le "bouclier fiscal" version Villepin est complètement oublié.

2) François Mitterrand/Michel Rocard a instauré en 1988 un plafonnement IR+ISF à 85% des revenus (puis 70% puis de nouveau 85%). Le terme "bouclier fiscal" n'était pas employé à l'époque mais il s'agissait de fait d'un "bouclier fiscal".

3) La "paquet fiscal" de 2007 (juridiquement "loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat" ou TEPA) comporte le "bouclier fiscal" version Sarkozy + d'autres mesures fiscales, principalement la quasi-disparition des droits de succession et la défiscalisation des heures supplémentaires.

Écrit par : Laurent de Boissieu | 04 mars 2011

Le paquet fiscal représente 12 à 15 milliards selon les estimations que j'ai vu passer. Aucune des mesures qui y figure ne semble avoir d'effet positif, en tout cas au regard de son coût. Toutes bénéficient principalement aux plus aisés.

Le bouclier fiscal version Sarkozy/Fillon représente environ 4% de ce "paquet". C'est lui que le gouvernement prévoit d'abandonner… avec un argumentaire (Fillon, Copé) qui annonce une baisse de la fiscalité sur le patrimoine, donc un cadeau encore plus grand aux plus riches.

Autrement dit, étant au bord du gouffre, on fait un nouveau pas en avant.

Écrit par : FrédéricLN | 06 mars 2011

Pour être plus objectif:

1) La défiscalisation des heures supplémentaires n'a pas fonctionné en raison de la crise; or, cette mesure n'aurait pas profité "aux plus aisés" mais aux salariés ouvriers, employés et agents de maîtrise (les professions libérales et les cadres dirigeants sont par nature exclus du dispositif des heures supplémentaires).
En revanche, les autres mesures du "paquet fiscal" (quasi-disparition des droits de succession, "bouclier fiscal") ont en effet bénéficié aux plus hauts revenus et/ou patrimoines.

2) En soi, l'idée originelle de taxer les plus-values sur le capital et non la détention du capital (ISF) me semble bonne. Je suis en effet à titre personnel pour:
- la suppression totale de l'ISF.
- le rétablissement d'un véritable impôt progressif sur les successions (ainsi que d'une réelle progressivité de l'impôt sur le revenu).
- une taxation égale du travail et du capital (suppression du prélèvement libératoire), voire une taxation supérieure du capital ("s'enrichir en dormant") par rapport au travail.

Écrit par : Laurent de Boissieu | 06 mars 2011

M. de Boissieu > "voire une taxation supérieure du capital ("s'enrichir en dormant") par rapport au travail" : faites attention ! Vous allez vous changer en gauchiste ;)
De toutes façons, d'après un ami "souverainiste" (qui a voté Bayrou en 2007, je ne comprendrai jamais...), "aujourd'hui de Gaulle serait considéré comme un dangereux agitateur marxiste-léniniste".
Plus sérieusement, je serais moi aussi favorable à une taxation supérieure des revenus du capital par rapport à ceux du travail. Je dois tenir ça de mon double héritage familial communiste et catholique.

Pour ce qui est de l'ISF, je pense qu'il est assez mal ficelé. Je ne suis pas expert sur la question (vous l'aviez compris), mais d'après ce que j'ai pu lire ici ou là, y entre en compte pour une large part le patrimoine immobilier. Pour éviter les aberrations du genre "agriculteur qui gagne à peine le SMIC obligé de payer l'ISF à cause de la ferme familiale", je pense qu'il faudrait se fonder sur une adéquation entre le patrimoine et les revenus avant de prélever. Par contre, en principe, je suis plutôt favorable à un "impôt sur les grandes fortunes" : "Les secours indispensables à celui qui manque du nécessaire, sont une dette de celui qui possède le superflu. Il appartient à la loi de déterminer la manière dont cette dette doit être acquittée." (Maximilien Robespierre, article 11 du projet de Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen présenté devant le Club des amis de la Liberté et de l'Égalité, dit Club des Jacobins, le 21 avril 1793)

En tous cas, merci d'avoir clarifié toute cette sémantique quelque peu indigeste sur ces "machins" fiscaux.

Et sinon, je serais curieux de savoir ce que vous entendez par "une réelle progressivité de l'impôt sur le revenu" : combien de tranches environ et quel taux maximum ? J'aimerais également connaître votre appréciation sur le projet de "revenu maximum", notamment préconisé par Jean-Luc Mélenchon et le Front de Gauche.

Écrit par : Brath-z | 07 mars 2011

@Brath-z. Votre ami "souverainiste" a bien raison! Toute politique planiste ou même keynésienne se situerait aujourd'hui sur le plan économique et social "à la gauche" du PS!
Je connais par ailleurs également des "nationaux-républicains" et des "souverainistes" qui ont voté François Bayrou au premier tour en 2007, non pas par adhésion à son programme mais en raison de sa potentialité à faire "turbuler le système", pour reprendre une expression de Jean-Pierre Chevènement en 2002. Je parie que certains d'entre eux voteront Marine Le Pen en 2012, exactement pour la même raison.

Sur la taxation du capital et du travail, c'est une des idées qui figurait déjà dans un programme politique que j'avais rédigé au début des années quatre-vingt-dix (sur d'autres points j'ai radicalement changé, mais pas sur celui-ci!).

Sur l'IGF ou l'ISF: c'est à mon avis au moment de la transmission (droits de succession) ou de l'accumulation (plus-values) et non au fil de l'eau qu'il faut imposer le capital (afin de ne pas imposer plusieurs fois la même personne pour le même capital). Voilà pourquoi je suis contre l'ISF (ou l'IGF).

Je suis pour un salaire maximum ("gauchistes", disiez-vous?); quant à l'impôt sur le revenu, on pourrait par exemple (sous toute réserve, car je réfléchis en écrivant) retenir 12 ou 13 tranches avec la tranche supérieure à 60 ou 65% pour les revenus du capital et à 50% pour les revenus (stricts) du travail. Et qu'on ne me parle pas d'évasion du capital, car - pour filer la métaphore - ce n'est pas parce qu'on ne peut pas empêcher le vol qu'il faut l'autoriser...

Écrit par : Laurent de Boissieu | 07 mars 2011

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