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13 décembre 2010

Bayrou a dit...

François Bayrou accuse Yann Barthès (Le Petit Journal de Canal+) d'avoir monté des propos qu'il n'aurait pas tenus, dimanche, au congrès du MoDem ("est-ce que vous avez l'honnêteté de dire que c'est des phrases que je n'ai pas prononcées ce week-end (...) ces phrases-là n'étaient pas du tout dans les déclarations de ce week-end, ce sont des déclarations anciennes"):

 

1. "Nous sommes un peuple qui fait des enfants".

Bayrou a dit (discours de clôture: 17'11''): "Nous sommes un peuple qui fait des enfants". VRAI

 

2. "Il y a des libéraux sociaux, il y a des sociaux-démocrates, il y a des écologistes et tous ensemble ils forment une famille unie".

Bayrou a dit (discours de clôture: 28'40''): "Il y a des écologistes, il y a des libéraux de progrès, il y a des sociaux démocrates". FAUX

Bayrou a dit (discours d'ouverture: 06'55''): "Il y a des écologistes, il y a des libéraux sociaux, il y a des sociaux démocrates et tous ensemble ils forment une famille unie". VRAI/FAUX

Question: pourquoi ce - petit - montage du Petit Journal inversant les propos tenus par François Bayrou?

 

3. "Les partis se tiennent par leurs noyaux durs".

Bayrou a dit (discours de clôture: 06'11'' et 06'23''): "Les partis se tiennent par leurs noyaux durs". VRAI

(expression déjà employée devant moi lors de l'Université de rentrée du MoDem, en septembre, puis ce même dimanche avant son discours de clôture)

 

Discours de clôture

 



Discours d'ouverture

 

[Ajout 14/12: François Bayrou a été hospitalisé après un malaise à la fin du Grand Journal: le malaise est-il la cause (il n'était déjà plus lui-même) ou la conséquence (prise de conscience de son manque de discernement: crainte d'un "effet Cohn-Bendit" bis) de ses propos?]

[Ajout: plusieurs proches de François Bayrou m'ont confirmé qu'il n'était physiquement pas bien durant l'émission elle-même, ce qui plaide en faveur de la première hypothèse]

[Ajout 16/12: François Bayrou a quitté l'hôpital du Val-de-Grâce et indiqué qu'il avait souffert d'"un ictus léger, c'est-à-dire une chute brutale de l'attention et de la mémoire"]

Foire aux questions sur le centre

Le débat est récurrent: je l'ai régulièrement - depuis 2008 - avec un député Nouveau Centre, je l'ai encore eu jeudi dernier, dans le contexte du "dîner de la République" de Jean-Louis Borloo, avec un sénateur Nouveau Centre, et mon dernier papier l'a relancé par SMS avec un proche d'Hervé Morin, à qui je dédie donc cette petite "foire aux questions sur le centre"!

 

1. Qu'est-ce que le centre?

2. Y-a-t-il toujours eu un centre en France?

3. Le MoDem est-il au centre?

4. Le Nouveau Centre est-il au centre?

5. Le Parti radical "valoisien" est-il au centre?

6. L'Alliance Centriste est-elle au centre?

7. L'UDF était-elle au centre?

8. Dominique de Villepin est-il au centre?

 

 

1. Qu'est-ce que le centre?

Le centre, la droite et la gauche ne signifient idéologiquement rien: il ne s'agit que d'un positionnement géographique au sein d'une assemblée.

Bien entendu, à un moment donné et dans un État donné le centre, la droite et la gauche possèdent un contenu idéologique; mais dans l'absolu, c'est-à-dire sans double contextualisation spatiale et temporelle, le centre, la droite et la gauche ne signifient rien.

Un exemple: la famille politique libérale a évolué en France (et plus généralement en Europe) de la gauche vers le centre puis la droite ("sinistrisme": Albert Thibaudet, 1932) - vous pouvez visualiser cette évolution en suivant l'emplacement géographique de la famille libérale (en jaune) dans la Chambres des députés sous la IIIe République:
http://www.france-politique.fr/chambre-des-deputes.htm

 

 

2. Ya-t-il toujours eu un centre en France?

Non, il n'y a pas toujours eu un centre en France! Périodes d'existence d'un centre :

- 1893-1899 (famille idéologique au centre: libéraux)

- 1920-1940 (familles idéologiques au centre: radicaux puis radicaux et démocrates-chrétiens)

- 1947-1956: Troisième Force (familles idéologiques au centre: socialistes, radicaux, démocrates-chrétiens et libéraux)

- 1962-1974 (familles idéologiques au centre: démocrates-chrétiens puis démocrates-chrétiens et radicaux)
Il n'existait effectivement plus de centre en France entre 1974 et 2007, c'est-à-dire jusqu'à la rupture de François Bayrou avec la droite.

 

 

3. Le MoDem est-il au centre?

Le MoDem est centriste, c'est même ce qui le caractérise puisqu'il a été fondé après la rupture (progressive entre 2002 et 2007) de François Bayrou avec la droite.

Mes interlocuteurs du Nouveau Centre considèrent toutefois que le MoDem est à gauche puisqu'il est dans l'opposition (vote contre la déclaration de politique générale du gouvernement de François Fillon le 24 novembre 2010). Or, c'est commettre une erreur: autant le nombre de familles idéologiques est infini, autant le nombre de positionnements géographiques au sein d'une assemblée est limité (extrême droite, droite - dont centre droit -, centre, gauche - dont centre gauche-, extrême gauche), autant l'appartenance à l'opposition ou à la majorité est binaire: on est soit dans l'opposition soit dans la majorité (il n'existe pas de troisième possibilité, contrairement à ce qu'a voulu faire croire François Bayrou entre 2002 et 2007 ou à ce que veut faire croire aujourd'hui Dominique de Villepin).

Bref, un parti peut appartenir à l'opposition sans être de gauche (qui songerait par exemple à classer le Front national à gauche?).

Cela dit, il est vrai que François Bayrou a, selon moi, voulu quitter le centre pour passer à gauche au moment des élections régionales (voir ma note "Bayrou passe à gauche"); seuls l'en ont empêché le mauvais score du MoDem et le bon score du PS et de ses alliés: le PS n'a alors pas eu besoin de fusionner avec le MoDem pour espérer l'emporter (même configuration que Marielle de Sarnez aux élections municipales de 2008 à Paris). Si François Bayrou était passé à gauche, il aurait cependant démonétisé sa prochaine candidature présidentielle en n'en faisait qu'un choix parmi d'autres à gauche (aux côtés de ceux du PS, d'Europe écologie - Les Verts et du Front de Gauche).

 

 

4. Le Nouveau Centre est-il au centre?

À l'inverse du MoDem, le Nouveau Centre a été créé par les membres de l'UDF qui souhaitaient rester à droite.

Il est donc logique que la grande majorité des élus de l'ex-UDF soient aujourd'hui au Nouveau Centre et non au MoDem, puisqu'ils ont toujours été élus en tant que candidats de droite. Ce n'est donc pas forcément une question de trahison ou de courage politique: de droite ils étaient, de droite ils sont restés pendant que François Bayrou passait au centre (c'est François Bayrou qui a bougé, ce ne sont pas eux).

Seuls élus ex-UDF à être aujourd'hui majoritairement au MoDem: les parlementaires européens. Exceptions logiques puisque les élections européennes constituent le seul scrutin à tour unique. Or, ce sont précisément les élections à deux tours qui poussent à des alliances de second tour et à une bipolarisation fatales à ceux qui n'appartiennent ni à la coalition de droite ni à la coalition de gauche, qu'il s'agisse du MoDem ou du FN.

 

 

5. Le Parti radical "valoisien" est-il au centre?

Pour la même raison que le Nouveau Centre, le Parti radical "valoisien" est à droite. La partition des radicaux est d'ailleurs la conséquence de la bipolarisation intervenue au début des années soixante-dix. À cette époque, le Parti radical historique s'est en effet coupé en deux:
- le Parti radical dit "valoisien" au centre (1972) puis à droite (1974)
- le Mouvement des Radicaux de Gauche (MRG), devenu depuis le Parti Radical de Gauche (PRG).

 

 

6. L'Alliance Centriste est-elle au centre?

L'Alliance centriste est le parti dont le positionnement est le plus ambigu. D'un côté, de par ses alliances électorales et les votes de ses parlementaires elle se positionne plutôt à droite. De l'autre, Jean Arthuis, son président, est en train de se recentrer: ralliement à la ligne centriste de François Bayrou dans la perspective de la prochaine élection présidentielle ("Si le candidat du centre n'est pas qualifié au second tour de la présidentielle, il doit chercher à conclure une alliance de gouvernement aussi bien avec le candidat de la droite qu'avec celui de la gauche", La Croix, 21 septembre 2010) et vote contre le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 (25 novembre 2010). 

 

 

7. L'UDF était-elle au centre?

L'UDF a été créée en 1978 afin de regrouper, face au RPR chiraquien (créé en 1976), la fraction giscardienne de la majorité de droite.

L'UDF avant 2007 - y compris François Bayrou lors de la présidentielle de 2002 (même s'il a brièvement hésité) - n'a ainsi jamais voulu incarner une troisième voie entre la droite et la gauche mais seulement offrir un second choix à droite.

Contrairement à ce qu'a fait croire François Bayrou lorsqu'il en était le président, l'UDF n'a donc jamais été positionnée au centre de l'échiquier politique. Je m'étais ainsi toujours interdit dans mes articles de qualifier hier l'UDF de centriste, comme je m'interdis aujourd'hui de qualifier le Nouveau Centre de centriste. CQFD!

 

 

8. Dominique de Villepin est-il eu centre?

Dominique de Villepin se trouve dans la même situation ambigue que François Bayrou entre 2002 et 2007: un pied dans la majorité, un pied dans l'opposition; un pied à droite, un pied ...ailleurs!

Cet "ailleurs" est-il le centre? En réalité, Dominique de Villepin semble hésiter entre "faire du Bayrou" ou "faire du Dupont-Aignan". À suivre...

 

 

Pour aller plus loin:

Hervé Morin veut incarner un centre de droite

Le centre: mirage ou réalité?

 

12 décembre 2010

François Bayrou ne veut pas perdre le monopole du centre

François Bayrou réélu président du MoDem.

 

François Bayrou ne veut pas perdre le monopole du centre

 

Laurent de Boissieu
La Croix, 10 décembre 2010

06 octobre 2010

Les villepinistes espèrent toujours former un groupe à l'Assemblée nationale

C'est un échec politique pour Dominique de Villepin. Alors que vient de s'ouvrir cette semaine la session parlementaire 2010-2011, les députés villepinistes ne sont finalement pas parvenus à trouver suffisamment d'alliés pour former un nouveau groupe. Depuis mai 2009, il suffit pourtant de réunir quinze membres sur un total de 577 députés. Or, si un groupe peut se constituer à tout moment, il lui faut en revanche impérativement exister au début de la session s'il veut bénéficier des droits spécifiques aux groupes d'opposition ou minoritaires et être représenté dans les organes de l'Assemblée nationale. C'est donc raté pour cette session, voire pour la législature. Qu'à cela ne tienne : les villepinistes ne renoncent pas. "Le besoin d'expression libre et indépendante des républicains sociaux se consolide de jour en jour, expose sereinement Marie-Anne Montchamp. Il faut le temps que chacun fasse son chemin, mais je suis absolument certaine que nous y arriverons."

La constitution de ce nouveau groupe se heurte pour l'instant à deux écueils. Le premier est interne : combien d'élus villepinistes sont vraiment prêts à rompre avec le groupe UMP ? Huit députés UMP adhèrent au parti de Dominique de Villepin, République solidaire, auxquels s'ajoute le non-inscrit Daniel Garrigue. Or, sur la réforme des retraites, sept villepinistes se sont abstenus (Marc Bernier, Daniel Garrigue, François Goulard, Jean-Pierre Grand, Jacques Le Guen, Marie-Anne Montchamp et Jean Ueberschlag), tandis que deux autres (Guy Geoffroy et Michel Raison) votaient pour.

Le second écueil est externe : avec qui s'allier pour atteindre le seuil de quinze membres ? Les villepinistes possèdent comme allié naturel le parti gaulliste Debout la République, qui compte deux députés : Nicolas Dupont-Aignan et François-Xavier Villain. Marie-Anne Montchamp avance en outre une "compatibilité" avec l'unique député et président du CNI, Gilles Bourdouleix. Mais ce dernier n'est aujourd'hui "pas prêt à franchir le Rubicon". Un autre député pourrait compléter le dispositif : le "gaulliste social de centre droit" Philippe Folliot (apparenté au groupe Nouveau Centre et porte-parole de l'Alliance centriste). Enfin, quelque huit députés sociaux du groupe UMP, gaullistes ou démocrates-chrétiens, seraient potentiellement intéressés… mais souhaitent attendre et conserver pour l'instant leur anonymat. Tout au moins "jusqu'au remaniement ministériel", confie l'un d'eux. En clair : tout dépendra de l'orientation, plus ou moins sociale, du futur premier ministre.

Cet été, les villepinistes avaient même proposé, non sans débats internes, une alliance technique avec les trois élus du MoDem. Mais François Bayrou - qui aurait également pu renouer à cette occasion avec le député Nouveau Centre Nicolas Perruchot - avait posé comme condition une rupture totale avec l'UMP, aussi bien avec le groupe parlementaire qu'avec le parti. Une condition irrecevable alors que Dominique de Villepin, en tant qu'ancien premier ministre encarté, est lui-même actuellement membre du bureau politique de l'UMP.

 

Laurent de Boissieu
La Croix, 6 octobre 2010

28 septembre 2010

Le retour de l'UDF

L'UDF n'est pas morte ! Pour le grand public, le parti créé par Valéry Giscard d'Estaing en 1978 a, certes, politiquement cédé la place en 2007 au Mouvement démocrate (MoDem) de François Bayrou. Mais, juridiquement, l'UDF bouge toujours.

Pour preuve : comme je l'ai révélé ce lundi dans La Croix, le bureau chargé de garantir et d'administrer "les intérêts juridiques, matériels, moraux, les idées et les valeurs de l'UDF" s'est secrètement réuni le 16 septembre dernier. Et aurait pris la décision de réanimer l'UDF.

 

Quelle est la situation juridique de l'UDF ?

L'UDF est "membre fondateur du MoDem", auquel elle a adhéré le 1er décembre 2007 "pour une période transitoire de trois ans". C'est-à-dire jusqu'au 1er décembre prochain.

Ce bureau comptait originellement 27 membres. Sept d'entre eux ont adhéré à un autre parti politique (un UMP-Parti radical, un Nouveau centre, cinq Alliance centriste), ce qui aurait du entraîner leur radiation de l'UDF (extrait des statuts : "L'appartenance à l'UDF est exclusive de toute adhésion à une autre formation politique au sens de l'Article 4 de la Constitution de la République. Tout manquement à la présente disposition entraîne la radiation automatique.")

Les membres de l'Alliance centriste siègent pourtant toujours au bureau de l'UDF, le parti de Jean Arthuis étant, d'après mes informations, discrètement devenu un mouvement associé de l'UDF (extrait des statuts : "Des Clubs ou Associations ayant pour objet l'organisation de débats publics ou l'expression de courants de pensées peuvent demander leur apparentement à l'UDF").

Pou résumer, les 25 membres du bureau actuel de l'UDF se répartissent selon mes décomptes personnels entre 17 à 19 MoDem (dont un en congés du parti : Michel Mercier, depuis son entrée au gouvernement), cinq Alliance centriste et un à trois sans étiquette.

 

Pourquoi réanimer l'UDF ?

L'idée d'une "maison commune" des centristes a été avancée dès 2008 par Jean Arthuis, puis reprise par Michel Mercier et plus récemment par François Bayrou. Toujours d'après mes informations, l'UDF (propriétaire du siège du MoDem) pourrait alors changer de nom et revivre publiquement en tant que structure dont aussi bien le MoDem que l'Alliance centriste seraient des composantes.

 

Est-ce un retour de François Bayrou à droite ?

Certains de mes confrères ont parlé de "recentrage" (en pensant "redroitage") de François Bayrou. C'est vrai dans le sens où, aujourd'hui, c'est davantage avec certains de ses anciens amis de l'UDF (Jean Arthuis, Nicolas Perruchot) qu'avec les dirigeants du PS idéologiquement compatibles que l'ancien candidat à l'élection présidentielle dialogue. Mais c'est faux dans le sens où François Bayrou n'est pas retourné à droite.

C'est même au contraire Jean Arthuis qui s'est recentré. Présent à l'université de rentrée du MoDem, le fondateur de l'Alliance centriste fait partie des ex-UDF qui étaient restés à droite sans toutefois vouloir adhérer au Nouveau centre d'Hervé Morin et de François Sauvadet. Or, Jean Arthuis a verbalement rallié la ligne centriste de François Bayrou dans la perspective de la prochaine élection présidentielle ("Si le candidat du centre n'est pas qualifié au second tour de la présidentielle, il doit chercher à conclure une alliance de gouvernement aussi bien avec le candidat de la droite qu'avec celui de la gauche", déclarait-il dans La Croix le 21 septembre dernier).

Il me semble certain que François Bayrou ne variera pas de son positionnement centriste jusqu'à l'entre-deux-tours de l'élection présidentielle (j'entrevois par exemple des alliances à géométrie variable aux cantonales, comme aux municipales de 2008). Même si, pour ce moment politiquement décisif, le président du MoDem exclut d'emblée de reconduire son refus d'alliance avec la gauche comme avec la droite. "J'ai mis un point final à cette interrogation", expliquait-il en aparté à l'université de rentrée du MoDem en précisant que, s'il n'est encore une fois pas lui-même qualifié au second tour en 2012, il apportera "une autre réponse qu'en 2007". En clair : il s'alliera avec le candidat de la gauche ou le candidat de la droite.

Son livre Abus de pouvoir, publié en 2009, ferme toutefois a priori toute possibilité d'alliance d'entre les deux tours avec Nicolas Sarkozy. Sauf à imaginer un scénario à la britannique, où les "libéraux démocrates" de Nick Clegg se sont finalement alliés, contre toute attente, au Parti conservateur de David Cameron.