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11 octobre 2007

L'honnêteté de Fillon

dd21de4511f07342daed3159000e3996.jpgCela ne figurait pas dans son discours écrit, mais au moins le premier ministre François Fillon aura-t-il eu, mercredi soir, devant Les Réformateurs (sensibilité la plus libérale de l'UMP), le courage de présenter avec franchise les conséquences de la politique de réformes libérales menée par son gouvernement :

 

"Je dois le dire devant tous les élus qui sont présents ici : la réforme de l'État, ça supposera que nous soyons courageux; la réforme de l'État, ça supposera que chacun d'entre nous accepte qu'il y ait moins de services, moins de personnel, moins d'État sur son territoire. Parce que la réforme de l'État général qui satisfait tout le monde mais qui ne se traduit par aucune suppression d'aucun établissement sur le territoire, ça n'existe pas."

 

La seule chose que l'on puisse regretter, c'est que Nicolas Sarkozy n'ait pas eu la même franchise durant la campagne présidentielle. Tandis que Jean-Louis Borloo, à l'inverse, s'était fait taper sur les doigts pour avoir osé rappeler un engagement du nouveau président pendant la campagne des élections législatives. En politique, la franchise ne paie pas toujours...

08 octobre 2007

Hébergement d'urgence pour les étrangers clandestins

e2df88c500ae2bee074497e2ee74e40f.jpgLa polémique sur l'accès à l'hébergement d'urgence des étrangers en situation irrégulière est typiquement le genre d'affaire où l'on entend dire tout et n'importe quoi. Quelques clarifications.

 

1. Le projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile prévoit-il de fermer l'accès des centres d'hébergement d'urgence aux étrangers clandestins ?

Non. Il n'a jamais été question, ni dans le texte gouvernemental ni dans le texte amendé par les parlementaires, de fermer l'accès des étrangers en situation irrégulière aux centres d'hébergement d'urgence.

 

2. Pourquoi, dès lors, une telle polémique ?

Examinons, d'abord, la rédaction actuelle de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable (dalo) :

Toute personne accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence doit pouvoir y demeurer, dès lors qu'elle le souhaite, jusqu'à ce qu'une orientation lui soit proposée. Cette orientation est effectuée vers une structure d'hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation (article 4).

 

Examinons, ensuite, la rédaction prévue à ce jour par le projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile :

Toute personne accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence doit pouvoir y demeurer, dès lors qu'elle le souhaite, jusqu'à ce qu'une orientation lui soit proposée si elle peut justifier de la régularité de son séjour sur le territoire dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. Cette orientation est effectuée vers une structure d'hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation (article 4 modifié).

 

Il ne s'agit donc pas de fermer l'accès des centres d'hébergement d'urgence aux étrangers en situation irrégulière (condition qui serait effectivement contraire aux valeurs de la "fille aînée de l'Église" et de la "patrie des droits de l'Homme") mais de ne pas leur ouvrir le droit à un logement pérenne en France (de même qu'ils n'ont, par exemple, pas droit au RMI). Dans l'état actuel du droit français, la seule "orientation" pour un étranger en situation irrégulière est en effet (sauf cas particuliers définis par la loi) la reconduite à la frontière. On peut vouloir changer la loi, mais on ne peut pas demander à une loi d'ignorer une autre loi.

 

3. Quelques précisions sémantiques :

Sans-papiers. Le mot est utilisé à tort. Le terme "sans-papiers" désigne en effet deux catégories particulières d'étrangers en situation irrégulière. D'une part, ceux qui dissimulent leur origine (les harraga : ceux qui brûlent leur papier d'identité d'origine). D'autre part, ceux qui ne sont ni régularisables ni expulsables. Mais il n'y a strictement aucune raison de qualifier de "sans-papiers" l'ensemble des étrangers en situation irrégulière !

edit : D'après une consoeur, sans-papiers signifierait en fait "sans-papiers réguliers pour séjourner sur le territoire  national" (synonyme d'étrangers en situation irrégulière). Donc acte.

 

Solidarité gouvernementale. Les membres du gouvernement forment constitutionnellement un organe collégial et solidaire. Tout ministre est donc responsable de tout acte pris par le gouvernement. Ce qui signifie que le projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile est tout autant un projet de loi "Hortefeux" qu'un projet de loi "Hirsch". Pour reprendre une phrase célèbre de Jean-Pierre Chevènement, "un ministre ça ferme sa gueule ou ça démissionne".

07 octobre 2007

Un détail essentiel

2661e8b0948dc66ea7826ca2b3637e9e.jpgLe premier ministre François Fillon a déclaré samedi, lors du conseil national de l'UMP, que "les polémiques" autour de la loi sur l'immigration "ont grossi jusqu'au ridicule un détail, en masquant l'essentiel".

Un "détail", c'est, selon le dictionnaire Le Robert, un "élément non essentiel d'un ensemble". Mais, en politique, le mot est négativement connoté depuis qu'en 1987 Jean-Marie Le Pen l'a employé pour qualifier les chambres à gaz de "point de détail de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale". L'utiliser est, au mieux une maladresse, au pire une provocation.

Quoi qu'il en soit, il existe deux façons d'apprécier si une partie d'un ensemble relève de l'essentiel ou du détail.

La première est de se demander si l'article sur l'identification par empreintes génétiques est, pour le gouvernement, une mesure essentielle du projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile. Le fait que cet article a été introduit par un amendement parlementaire permet de penser que non.

La seconde manière est d'apprécier si cet article touche à des principes essentiels. Or l'amendement sur les tests génétique va par nature à l'encontre de la conception française de la filiation (fondée sur les liens du coeur et non sur les liens du sang) et du recours à l'expertise biologique (uniquement sur décision judiciaire). Et, partant, qu'il ne saurait être qualifié de "détail"...

22 août 2007

TEPA de gauche, toi !

c5bb7e7180a437fa61ac059807f0f908.jpgLa loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (TEPA ou "paquet fiscal") a été publiée aujourd'hui au Journal Officiel. Que l'on s'en désole ou que l'on s'en félicite, cette loi remet en cause les deux fondements d'une politique fiscale de gauche, c'est-à-dire les deux impôts progressifs républicains:

- l'impôt sur les revenus des personnes physiques (instauré en 1913) avec l'abaissement du bouclier fiscal de 60% à 50%

- l'impôt sur les successions (instauré en 1901) avec l'objectif d'exonérer 95% des successions en ligne directe

L'avenir dira si, un jour, une "gauche décomplexée" remettra ou non en cause ces mesures adoptées par une "droite décomplexée"...

20 août 2007

La France en Irak occupée

3efc5a22a537e703e2fbc380d7447181.jpgBernard Kouchner est en visite en Irak. Il est humain qu'il veuille rendre hommage à ses amis tués dans ce qu'il reste de cet État : Sergio Vieira de Mello, représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies; Nadia Younes, Fiona Watson et Jean-Sélim Kanaan, membres de son équipe au Kosovo. Mais Bernard Kouchner n'est pas que Bernard Kouchner : Bernard Kouchner est ministre des affaires étrangères de la France. Et sa visite est présentée comme "officielle" et non comme privée.

On pouvait penser que Nicolas Sarkozy avait changé sur l'Irak en particulier et sur sa conception des relations avec les États-Unis en général, après avoir - très tardivement, en janvier dernier - rendu hommage à la position de Jacques Chirac lors de la crise irakienne de 2003. Ce retour de la France sur une terre occupée par les Américains et leurs alliés prouve qu'il n'en est rien.

Si la nomination de Bernard Kouchner au gouvernement a été présentée comme un exemple de l'ouverture à gauche affichée par Nicolas Sarkozy, sur l'Irak les deux hommes semblent sur la même ligne depuis toujours. Contre une intervention unilatérale américaine, certes (Nicolas Sarkozy, en janvier 2003 : "la décision d'un conflit ne peut être qu'une décision collective, prise après un débat au conseil de sécurité de l'ONU" car "les Américains n'ont pas à décider seuls, sans tenir compte de l'avis d'autres nations, du fait de savoir s'il doit ou non y avoir paix ou guerre"). Mais pour une intervention sous couvert de l'ONU ou, tout au moins, contre une opposition de la France à cette dernière (Nicolas Sarkozy, en septembre 2006 : "La menace de l'utilisation de notre droit de veto était inutile", dénonçant dans le discours prononcé par Dominique de Villepin au Conseil de sécurité de l'ONU, le 14 février 2003, "l'arrogance française", les "mises en scène" et la "grandiloquence stérile").

Comme me l'a dit un ancien ministre : "Si Nicolas Sarkozy avait dit ce qu'il pensait, le gouvernement aurait explosé". À l'époque, il était numéro deux du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin. Aujourd'hui, il est président de la République. Et, logiquement, "Sarkozy l'Américain" réoriente sa politique dans un sens plus conforme à ses convictions. Mais nul ne peut lui en faire le reproche : il a été élu pour cela.

Reste à savoir s'il ira jusqu'au bout en tenant une de ses promesses électorales implicites, qui briserait le tabou gaulliste du retour de la France au sein du commandement intégré de l'OTAN. "La France, qui a quitté les structures intégrées de l'OTAN en 1966, n'en reste pas moins un membre très actif et l'un des principaux contributeurs opérationnels", expliquait-t-il dans le numéro de janvier-février de la revue Défense de l'IHEDN. Concluant que la France "devra demain réduire l'écart entre son discours et la réalité de la situation".