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25 février 2016

De Guy Mollet à Martine Aubry

Martine Aubry et Daniel Cohn-Bendit ont cosigné, le 24 février 2016, dans Le Monde, une tribune contre l'élargissement de la déchéance de nationalité et contre la libéralisation du code du travail (avant-projet de loi "El Khomri").

Si cette prise de position est attendue sur son volet déchéance de la nationalité, il en est tout autrement de son volet code du travail:

- Daniel Cohn-Bendit est le représentant d'une écologie à la fois libertaire et libérale (économiquement à la droite du PS), aux antipodes d'une écologie antilibérale (économiquement à la gauche du PS).

- Martine Aubry incarne le nouveau "mollétisme": un discours de rupture antilibérale mais une pratique consistant à soutenir finalement les traités européens d'inspiration libérale ainsi que les motions majoritaires au PS (motion Harlem Désir au congrès de Toulouse en 2012, motion Jean-Christophe Cambadélis au congrès de Poitiers en 2015).

 

De fait, même si on peut vouloir libéraliser le Code du travail sans lien avec la construction européenne, on ne peut pas - sauf à encore tromper les Français - proposer une autre politique, antilibérale, sans, en conséquence, remettre en cause les traites européens.

Bref, Martine Aubry à la présidence de la République ce serait exactement comme François Hollande en 2012 avec sa promesse forcément non respectée de "renégociation" du traité budgétaire européen signé sous Nicolas Sarkozy.

 

Pour anticiper le projet de loi "El Khomri", il suffisait d'ailleurs de lire les recommandations 2015 de la Commission européenne pour la France:

 

23 février 2016

FN-Farage contre FN-Cameron

S'il était selon moi trompeur d'écrire des articles faisant croire que le FN était divisé sur la question de la sortie de l'euro, le FN est en revanche bel et bien divisé sur la question de la sortie de l'Union européenne.

Certes, l'ensemble du FN se retrouve sur le calendrier en cas d'élection de Marine Le Pen à la présidence de la République en 2017:

- renégociation des traités européens

- référendum:

- si la renégociation aboutit: le FN appelle à approuver le nouveau traité européen

- si la renégociation échoue: le FN appelle à sortir de l'actuelle Union européenne

 

Sauf que le diable se cache dans les détails...

Tout dépend en effet sur quoi porte ces renégociations. C'est ici que deux FN s'opposent:

- le FN-Cameron (Marion Maréchal Le Pen, Bernard Monot) veut négocier, comme plusieurs États membres en bénéficient déjà (Royaume-Uni, Irlande, Danemark, Pologne), des clauses de non-participation à certaines politiques européennes. Ce sont ces clauses que David Cameron vient de renégocier pour le Royaume-Uni.
L'Union européenne serait maintenue, mais deviendrait une Union européenne à la carte. Concrètement, il s'agirait pour la France de rester au sein de l'Union européenne mais de:

- sortir de l'espace Schengen (recouvrer la souveraineté territoriale)

- sortir de la zone euro (recouvrer la souveraineté monétaire et la souveraineté budgétaire)

 

- le FN-Farage (Marine Le Pen, Florian Philippot) ajoute le recouvrement d'une quatrième souveraineté: la souveraineté législative, c'est-à-dire que la loi française redevienne au-dessus des normes européennes. Or, il ne s'agit là plus seulement de participer ou non à telle ou telle politique européenne, aussi importante soit-elle (espace Schengen, zone euro), mais de refuser le caractère supranational de la construction européenne, c'est-à-dire sa nature même.
Rappelons que la primauté du droit européen a été affirmée dès 1963-1964 (arrêts Van Gend en Loos et Costa c/ENEL de la Cour de justice des Communautés européennes), puis accepté en France entre 1975 (arrêt Jacques Vabre de la Cour de cassation) et 1989 (arrêt Nicolo du Conseil d'État).
Bref, mettre la souveraineté législative dans la renégociation, c'est y mettre un élément qu'on sait d'avance inacceptable pour nos partenaires européens. C'est donc en réalité dissimuler sa volonté de sortir de l'Union européenne afin de cacher ses divisions internes sur le sujet.

 

19 février 2016

Medef 1 - France 0

C'est le 18 janvier 2000 que l'assemblée générale du Medef lança, sous la présidence d'Ernest-Antoine Seillière, son grand chantier de "refondation sociale".

Au cœur de ce projet figurait la volonté de redéfinir la place respective de la Loi et de la négociation, et donc de l'État et des partenaires sociaux, en renversant la hiérarchie des normes sociales:

"La refondation sociale vise à revitaliser le dialogue au plus près du terrain, c'est-à-dire dans l'entreprise et dans les branches professionnelles, en renversant la hiérarchie des normes sociales: d'abord le contrat en entreprise, puis, à défaut, le contrat collectif de la branche c'est-à-dire du métier, et cela dans le cadre de principes généraux fixés au départ par la loi."
Ernest-Antoine Seillière devant l'Académie des sciences morales et politiques, 4 décembre 2000 (Henri Jacot, "La «refondation sociale» n'est pas un long fleuve tranquille", Mouvements, numéro 14, 2/2001, p. 8-14).

À l'époque, en dehors du Medef, seules les personnalités de droite les plus libérales avaient soutenu ce projet remettant en cause la place primordiale qu'occupe la Loi, expression de la volonté générale et garante de l'égalité, dans l'identité française.

Quinze ans après, tout a changé. Non seulement la quasi-totalité des présidentiables de droite s'y sont ralliés, mais le projet de loi qui sera examiné le 9 mars 2016 par un conseil des ministres de gauche devrait s'y rapprocher.

Reste à savoir si c'est notre modèle politique et social qui n'est plus tenable au XXIe siècle, ou si ce sont ceux que nous élisons qui ne sont pas prêts - par idéologie, par manque de courage ou de volonté - à tout faire pour défendre ce qui fait aussi que la France est la France.

 

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