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01 avril 2011

Bilan des élections cantonales pour l'extrême droite

Les résultats détaillés (tris et calculs personnels):

nuance candidats voix % (1) % (2)
FN 1.440 1.440 1.379.249 1.379.249 15,06 15,06 19,19
ER 1 79 1.130 15.201 0,01 0,17 21,35
FI 27 5.520 0,06 3,58
LS 19 4.747 0,05 3,52
PDF 19 2.248 0,02 2,49
MVL 2 13 0,00 0,12
LN 6 298 0,00 1,91
PNR 1 9 0,00 0,55
divers 4 1.236 0,01  
AR 6 6 379 379 0,00 0,00 1,31
Total 1.525 1.394.829 15,23  

(1) moyenne nationale

(2) moyenne sur les cantons présents

 

ER - Entente Républicaine (soutien FN et Nissa Rebela-Bloc Identitaire)

FI - Fédération Identitaire: 25 Bloc Identitaire (14 Nissa Rebela, 5 Ligue du Midi, 2 Jeune Bretagne...), 2 Alsace d'Abord

LS - Ligue du Sud: y compris 3 MNR-Ligue du Sud et 1 PDF-Ligue du Sud; j'ai également rattaché un candidat MNR isolé (Bouches-du-Rhône)

PDF - Parti de la France

MVL - Mouvement de la Vie et des Libertés

LN - Ligue Nationaliste PFRC

PNR - Parti National Radical

AR - Alliance Royale

 

Les élus:

nuance département canton élu sortant
FN Var Brignoles Jean-Paul Dispard non
Vaucluse Carpentras-Nord Patrick Bassot non
LS Vaucluse Orange-Est Marie-Claude Bompard oui

Rappel: Historique des conseillers généraux FN

28 mars 2011

Historique des conseillers généraux FN

Chronologie des conseillers généraux élus sous l'étiquette FN (hors conseillers de Paris):

1985 Bouches du Rhone Marseille-Notre-Dame-du-Mont Jean Roussel
1988 Manche Canisy Fernand Le Rachinel
1989 (p) Bouches du Rhone Salon-de-Provence Philippe Adam
1992 Alpes-Maritimes Nice-14 Jacques Peyrat
1994 Manche Canisy Fernand Le Rachinel
Var Toulon-6 Eliane Guillet de la Brosse
Eure-et-Loir Dreux-Ouest Marie-France Stirbois
1997 (p) Haut-Rhin Mulhouse-Nord Gérard Freulet
1998 Var Toulon-5 Dominique Michel
Oise Noyon Pierre Descaves
Bouches du Rhone Marignane Daniel Simonpieri
2001      
2002 (p) Vaucluse Orange-Ouest Jacques Bompard
2004 Vaucluse Orange-Est Marie-Claude Bompard
2008      
2011 Var Brignoles Jean-Paul Dispard
Vaucluse Carpentras-Nord Patrick Bassot

(p): élection cantonale partielle

Compilation personnelle à partir de mes archives électorales

 

Rappels:

 

25 mars 2011

FN: 5 triangulaires et 394 duels

Présence comparée du FN au second tour des élections cantonales de 2011 et 2004:

  élections cantonales 2004 élections cantonales 2011  
Quadrangulaires 4 0 -4
Triangulaires 215 5 -210
Duels FN-gauche 41 57 266 394 +225 +337
Duels FN-droite 16 128 +112
Total 276 399 +123

 

Duels FN-...
PCF 38 266 394
PS 203
PRG 10
dvg 13
EELV 2
NC 5 128
UMP 90
dvd 33

 

Sources: Ifop pour 2004 et AFP pour 2011

[j'avais prévu d'autres notes pour cette fin de semaine - et je devais également participer ce vendredi à un séminaire sur "les journalistes et leurs blogs" - mais mes problèmes informatiques ont bouleversé mon emploi du temps... d'ailleurs mon ordinateur ne démarre toujours pas :(]

23 mars 2011

Les 20 meilleurs scores départementaux du FN aux élections cantonales

Moyenne nationale : 15,06%

VAR (83) 27,54
BOUCHES DU RHONE (13) 26,86
VAUCLUSE (84) 25,84
ALPES MARITIMES (06) 25,42
AUBE (10) 24,80
GARD (30) 24,51
OISE (60) 24,21
AISNE (02) 23,66
MOSELLE (57) 23,33
NORD (59) 23,09
HERAULT (34) 22,93
PAS DE CALAIS (62) 22,86
SEINE ET MARNE (77) 21,64
LOIRET (45) 21,61
MARNE (51) 21,54
HAUTE MARNE (52) 21,37
LOIRE (42) 21,18
PYRENEES ORIENTALES (66) 20,76
AUDE (11) 20,60
EURE (27) 20,30

Tous droits réservés Laurent de Boissieu

16 mars 2011

Défendre la République, c'est décontaminer la pensée FN?

Ancien membre de la Fondation Marc-Bloch, je me suis senti, à mon très modeste niveau, visé par l'article publié dans Le Nouvel Observateur du 10 mars sous la plume d'Ariane Chemin ("Ils décontaminent la pensée FN" 1 2). J'ai préféré laisser la parole aux principaux intéressés (étudiant, je n'étais qu'un adhérent de base de la Fondation). Je vous invite donc à lire la réponse de Philippe Cohen (Le Pen, le Nouvel Obs et Marianne: une leçon d'histoire) et d'Élisabeth Lévy (C'est moi, la peste brune?), ainsi que celle du toujours excellent Jean-Paul Brighelli ("Je fais, tu fais, nous faisons le jeu du FN...").

Il m'a finalement paru utile de livrer au débat mes propres petites mises au point.

 

1. Ma consœur cite dans la famille des "républicains des deux rives" Philippe Séguin, Charles Pasqua, Jean-Pierre Chevènement et Philippe de Villiers. Or, ce dernier n'en fait pas partie: cet ancien membre de la composante libérale de l'UDF est un national-libéral et non un national-républicain. L'alliance, ou pas, avec Philippe de Villiers, a d'ailleurs toujours été un sujet de débats entre partisans d'une ligne strictement nationale-républicaine et partisans d'un rassemblement souverainiste (donc ouvert aux souverainistes non républicains); je me contenterai de rappeler quelques épisodes de ce débat récurrent:

- la préparation de la liste de Charles Pasqua aux élections européennes de 1999, qui devait originellement être ouverte à la gauche républicaine (Jean-Pierre Chevènement, Max Gallo, Régis Debray).

- les débats internes au Rassemblement pour la France (RPF) lors de la rédaction de la charte du parti (au passage, la ligne de clivage ne passait pas entre pasquaïens et villiéristes mais à l'intérieur des pasquaïens, entre une aile droite - Jean-Jacques Rosa, Pierre Monzani et Jean-Charles Marchiani - et une aile gauche - Paul-Marie Coûteaux, William Abitbol et Jean-Christophe Comor).

- la candidature de Jean-Pierre Chevènement à l'élection présidentielle de 2002, avec la tentative de Paul-Marie Coûteaux de rapprocher Jean-Pierre Chevènement et Philippe de Villiers.

 

2. Ma consœur écrit que "Jean-Pierre Chevènement porte sur ses épaules la défaite de Lionel Jospin" à l'élection présidentielle de 2002. Comme j'ai déjà eu maintes fois l'occasion de l'écrire, ce n'est absolument pas mon analyse: la défaite de Lionel Jospin est bien plus politique (l'électorat populaire se détournant d'un PS rallié à l'Europe néolibérale depuis le milieu des années quatre-vingts) que mécanique (multiplication des candidatures "à gauche"). "Lorsque le Sage montre la lune, l'imbécile regarde le doigt"...

De fait, le populisme d'extrême droite progresse en Europe davantage au détriment d'une gauche sociale-démocrate convertie au social-libéralisme que de la droite libérale-conservatrice. L'intérêt de la candidature de Jean-Pierre Chevènement était d'ailleurs de proposer une alternative (une troisième voie "au-dessus de la droite et de la gauche telles qu'elles sont devenues") qui ne soit pas extrémiste. Sur la forme, cette alternative populiste et républicaine s'est même en quelques sortes retrouvée à l'élection présidentielle de 2007 dans la contestation populiste et démocrate de François Bayrou (relire à ce sujet son livre Au nom du tiers état, Hachette, 2006).

 

3. Ma consœur écrit que demeure "une troupe d'électeurs suffisante - on l'a vu en 2002 - pour faire turbuler le système et modifier le premier tour de l'élection présidentielle". Elle commet là une erreur d'interprétation. Pour Jean-Pierre Chevènement, faire "turbuler" le système c'était "en mars" atteindre 15% des intentions de vote dans les sondages et qu'en même temps l'un des deux sortants (cohabitation Chirac-Jospin) descende en-dessous de la barre des 20% afin finalement d'être qualifié au second tour le 21 avril. Bref, la troupe d'électeurs n'a en réalité pas été suffisante en 2002...

 

4. Ma consœur écrit que "depuis 2005, l'anti-pensée unique est devenue dominante".

Première question: qu'est-ce que la pensée unique? Elle a été définie en 1998 par Henri Guaino, dans L'Humanité: "La pensée unique est ce compromis passé entre les rentiers, certains héritiers de Mai-68 et les technocrates, qui débouche sur la haine de l'État, l'apologie du chacun pour soi et l'argent-roi. En d'autres termes, un mélange de conservation réactionnaire, de libéralisme et de libertarisme, qui pourrait se formuler ainsi : la loi de la jungle, plus la morale du possédant, plus l'élitisme... Le programme est clair: l'être humain est considéré comme un moyen, le travail comme une variable d'ajustement, l'exclusion comme un mode de régulation, la France comme une entreprise qui vivrait au-dessus de ses moyens. Sous-entendu: il y aurait trop de redistribution, trop de protection sociale, trop de services publics... Quant au triomphe de la pensée unique, on peut le voir dans la prise de pouvoir d'une élite qui cherche à sortir du carcan de la solidarité nationale, du modèle républicain et de la souveraineté populaire..."

Bref, la dénonciation de la pensée unique - qu'Alain Minc revendiquait comme "cercle de la raison" - se situe sur le terrain économique et social (franc puis euro forts, libéralisations, désindustrialisation, délocalisations, etc.). Or, Ariane Chemin explique qu'"en focalisant le débat sur leurs thèmes fétiches - l'identité française, l'État, l'islam -, [les intellectuels souverainistes] ont  irrigué le champ politique qui court de Sarkozy à [Marine Le Pen]". Voyons de plus près.

"L'État", c'est certain.

"L'identité française", pourquoi pas, à condition qu'il s'agisse d'une référence à ce qui caractérise, pour reprendre l'expression du Conseil constitutionnel, les "principes inhérents à l'identité constitutionnelle de la France" (gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple; République indivisible, laïque, démocratique et sociale). Est-ce vraiment ce qu'à en tête ma consœur? Je n'en ai pas l'impression, loin de là...

"L'islam", là, c'est carrément un contresens sur la notion de pensée unique. Ce contresens devient une contrevérité comique quelques pages auparavant, lorsque Laurent Joffrin écrit que sont notamment visés par les dénonciateurs de la pensée unique "les partisans archaïques de la République sociale"!

Cette polémique m'a donné l'heureuse occasion de me plonger dans mes archives. Et de retrouver un article du Monde, daté de mai 1998, sur les "nationaux-républicains" de "la toute nouvelle Fondation Marc-Bloch". "De Jean-Pierre Chevènement à Charles Pasqua, les pourfendeurs de la pensée unique, de la construction européenne et du mondialisme mettent en avant la défense des idéaux de la République et de la nation", écrivaient Raphaëlle Bacqué et ...Ariane Chemin. J'ai beau relire cet article, je n'y trouve aucune trace de ces soi-disant "thèmes fétiches", de l'absolutisation de l'identité nationale au rejet de l'islam. Il y a donc quelque part un problème dans le travail journalistique de ma consœur, soit hier soit aujourd'hui...

 

Seconde question: la pensée unique est-elle dominante? Je ne dois pas vivre dans la même France qu'Ariane Chemin! D'une part, je n'ai pas l'impression que les partisans d'une "autre politique" - d'Emmanuel Todd à Jean-Luc Gréau en passant par Jacques Sapir - dominent le paysage intellectuel et médiatique. D'autre part, je n'ai pas l'impression que les candidats qu'y s'en réclament peu ou prou soient en mesure d'être élus à la présidence de la République, qu'il s'agisse du républicain de gauche Jean-Luc Mélenchon (autour de 5-6% des intentions de vote dans les sondages) ou du gaulliste Nicolas Dupont-Aignan (1-2%). Reste le cas Marine Le Pen.

 

5. Marine Le Pen, républicaine?

Venons-en au fond de l'article. Le raisonnement d'Ariane Chemin (et d'un Jean-Michel Aphatie parlant de "la ligne Marianne Le Pen") est simple. La Fondation Marc-Bloch défendait la République indivisible, laïque, démocratique (souveraineté nationale) et sociale telle qu'issue du Conseil national de la Résistance. Marine Le Pen importe aujourd'hui cette référence dans ses discours. Donc la Fondation Marc-Bloc aurait "décontaminé le pensée FN". Curieux raisonnement.

Tout d'abord, tout véritable antilepéniste ne pourrait que se féliciter si Marine Le Pen, en rupture avec l'orientation historique du FN, adoptait une telle ligne, plus rien ne justifiant alors le "cordon sanitaire" autour de son parti. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le démontrer sur ce blog (ici ou ), ce n'est toutefois pas le cas, le FN demeurant antirépublicain au moins dans sa conception de la communauté nationale (différentiation entre les "Français de souche" et les Français issus de l'immigration).

Ensuite, le raisonnement consistant à affirmer qu'une idée ou qu'un sujet deviendrait infréquentable dès lors que l'extrême droite s'en saisirait me semble particulièrement contre-productif et surtout dangereux. C'est même, selon moi, là que réside le véritable piège. Je l'écrivais dès janvier 2010: "Après avoir abandonné dans les années quatre-vingt la Nation à l'extrême droite, pourquoi faut-il qu'aujourd'hui la droite et la gauche de gouvernement lui abandonnent la République?". En réalité, ce raisonnement est bien pratique, car il permet aux chiens de garde de la pensée unique de disqualifier toute pensée alternative au néolibéralisme en la marquant au fer rouge du sceau de l'extrême droite.