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19 février 2009

La République dans les DOM, les DOM dans la République

Ce qui se passe en Guadeloupe prouve, une fois encore, que plus la République tourne le dos à ses valeurs et à une partie de ses citoyens, plus les antirépublicains prospèrent.

La Guadeloupe est un département français.

Alors, que la République se comporte vis-à-vis de la Guadeloupe et de tous les autres DOM comme vis-à-vis de tout département français !

 

- Pourquoi avoir autorisé dans les DOM jusqu'en 1993 l'utilisation de l'insecticide chlordécone, interdit dès 1990 en métropole ?

 

- Pourquoi accepter dans des DOM l'existence de monopoles économiques qui engendreraient immédiatement une nouvelle Révolution française en métropole ?

 

- Pourquoi dans les statistiques publiques l'INSEE sépare-t-elle les DOM des autres départements français ?

 

- Que justifie aujourd'hui la taxe d'Octroi de Mer, qui gonfle les prix autant qu'elle protège les entreprises locales ? (il y aurait bien d'autres moyens de favoriser la consommation de proximité, dans les DOM comme en métropole !)

 

- Pourquoi avoir à l'origine décalé l'application du RSA dans les DOM (2010 au lieu de 2009) ?

 

- Pourquoi avoir omis les DOM dans les nouveaux passeports biométriques français franco-européens ?

 

- Pourquoi à la rubrique Élections du ministère de l'Intérieur figure la consultation des électeurs de Corse en 2003 et non celles des électeurs de Guadeloupe et de Martinique la même année ?

 

 - Pourquoi maintenir l'existence d'un ministère de l'Outre-Mer ?

 

- Pourquoi certains médias ont traité de la crise sociale dans un département français comme s'il s'agissait de la crise sociale dans une État étranger (reportages sur les "touristes français" (sic) bloqués, etc.)  ?

 

- Nicolas Sarkozy ne se serait-il pas immédiatement rendu sur place si une crise sociale semblable avait éclaté dans n'importe quel département métropolitain ?

 

Faute de République et face à toutes ces humiliations, ce sont les antirépublicains qui se frottent les mains. À commencer par les antidépartementalistes zélateurs de la diversité institutionnelle (dont Nicolas Sarkozy, avant qu'il ne se prenne, en 2003, une châtaigne en Corse), les autonomistes ou les indépendantistes de tous poils.

 

La preuve par les élections prud'homales de 2008 en Guadeloupe...

Indépendantiste et racialiste, l'Union Générale des Travailleurs de Guadeloupe (UGTG) a progressé de neuf sièges (26 élus sur 44 à pourvoir). Elie Domota, son secrétaire général, est justement le porte-parole du Lyannaj Kont Pwofitasyon (LKP, Collectif contre l'exploitation).

Tandis que la Confédération Générale du Travail de Guadeloupe (CGTG, séparée de la CGT depuis 1961) est arrivée deuxième avec 14 élus. Son patron, Jean-Marie Nomertin, étant par ailleurs un militant de Combat Ouvrier, équivalent local de Lutte Ouvrière.

27 décembre 2008

Français, sans commentaire !

indivisibles.jpg

J'ai atterri par hasard sur le site Internet d'une association : Les Indivisibles.

Quel bonheur, sur le fond et sur la forme ! À l'opposé du discours racialiste de plus en plus dominant, le message de cette association, qui ne manque pas d'humour, est simple : quelle que soit notre couleur de peau ou notre religion, nous sommes "Français, sans commentaire !".

Une évidence au sein de la France Républicaine, qu'il convient malheureusement de rappeler aujourd'hui.

 

L'occasion pour moi de pousser un coup de gueule sémantique : marre de ceux qui confondent "immigrés" et "étrangers", marre de ceux qui parlent de "Français de souche" ou de "noirs de France", marre des préjugés (pour paraphraser Gaston Kelman, on peut être noir de peau et ne pas aimer le manioc...), marre, enfin, du discours racialiste qui se réclame de Barack Obama tout en tournant le dos à son magnifique projet post-racial!

 

 

[Ajout: le 20 janvier 2010, la présidente de l'association Les Indivisibles, Rokhaya Diallo, a cosigné un "Appel pour une République multiculturelle et post-raciale". L'objectif partagé reste de lutter contre ceux qui racisent un concitoyen en le renvoyant à sa couleur de peau. Mais, comme outil, cette tribune propose paradoxalement de racialiser la société française en y introduisant des statistiques ethnoraciales (demande explicite) et des quotas ethnoraciaux (demande implicite)! "Il faut donc distinguer ce que l'on souhaite pour notre société - l'horizon d'un monde où personne ne serait plus jugé sur la couleur de sa peau ou sur son patronyme - et les moyens pour y parvenir", avancent les signataires. Bref, il s'agirait selon eux de combattre le racisme en devenant, comme les racistes, des racialistes! Non possumus.]
 

21 décembre 2008

Malek Boutih qui dit oui, qui dit non

boutih.jpgMalek Boutih a dit "oui" (ce qu'il nie), puis, finalement, "non" à Nicolas Sarkozy pour occuper la fonction de commissaire à la diversité et à l'égalité des chances. Il s'en explique ce dimanche dans le JDD :

 

Le JDD : Pourquoi avoir refusé ?

Malek Boutih : Pas par idéologie. Il y avait d'autres candidats très compétents. Yazid Sabeg fera très bien l'affaire (...) J'ai l'ambition - ce n'est pas un gros mot - de devenir l'un des principaux dirigeants du PS.

 

Bref, que dit implicitement le secrétaire national du PS ? Qu'il a refusé non pas en raison de divergences idéologiques avec la majorité de droite, mais simplement parce que son plan de carrière passe par le PS. Les militants dudit parti doivent s'en étrangler : voilà un de leurs dirigeants qui affirme publiquement ne pas avoir de divergences idéologiques avec Nicolas Sarkozy !

 

J'ai beaucoup d'estime pour Malek Boutih, son parcours et ses idées : il fait partie de la gauche républicaine qui n'hésite pas à parler sans tabou ni langue de bois de sécurité, de quartiers difficiles ou d'immigration. En tant qu'un des premiers signataires de l'Appel contre la statistique ethnique, il aurait cependant pu mettre en avant une bonne raison de s'opposer idéologiquement à Nicolas Sarkozy, qui a ressorti cette idée, mercredi dernier, dans son discours sur la "diversité". Pourquoi ne le fait-il pas ?

Et, personnellement, je pense que Yazid Sabeg ne fera justement pas l'affaire, en tant que premier signataire d'un autre appel, le Manifeste pour l'égalité réelle, qui, contrairement au ton général du discours d'Henri Guaino de Nicolas Sarkozy, penche plus du côté de la notion de diversité raciale que de celle de diversité sociale.

À ce propos, je tiens à tordre le cou à une idée fausse qui commence à gagner du terrain, consistant à opposer l'égalité réelle à l'égalité supposée formelle de la République. Selon Yazid Sabeg, cette dernière justifierait donc "l'injustice par le principe d'égalité". D'où l'appel à "l'avènement de politiques publiques volontaristes en faveur de l'égalité".

Or, au contraire, la République c'est par définition la mise en oeuvre de politiques publiques volontaristes ! Et c'est plutôt l'absence de République, au nom d'une idéologie néolibérale dominante, qui pose problème plus qu'un prétendu trop plein de République. Ce que la République n'est pas, en revanche, et ne sera jamais sauf à ne plus être la République, c'est la mise en oeuvre de la discrimination positive (c'est-à-dire, je le rappelle, de politiques publiques fondées sur une différenciation raciale, les indispensables mesures d'égalité sociale et territoriale relevant d'une toute autre logique, bien républicaine celle-là).

23 novembre 2008

Flagrant délit de duplicité

poste.jpgDes manifestations ont été organisées samedi, à l'appel de cinq syndicats représentant 95% du personnel de La Poste (CGT, Sud-PTT, CFDT, FO, CFTC), pour s'opposer à la transformation de l'établissement public en société anonyme. Ce projet est destiné à permettre à l'horizon 2011 une ouverture de 30% de son capital afin de faire face à la concurrence.

Parmi les manifestants, notamment, François Hollande, encore pour quelques (?) jours premier secrétaire du PS...

Quelle hypocrisie ! Car, quel que soit le statut de La Poste, les directives européennes de libéralisation du secteur postal ont été successivement approuvées par les gouvernements de Lionel Jospin (PS)* et de Jean-Pierre Raffarin (UMP)**.

Bel exemple de duplicité du PS, qui dénonce à Paris ce qu'il a approuvé à Bruxelles. Peu importe en effet le statut et la propriété du capital de La Poste : une fois que le secteur postal est libéralisé, la logique de la concurrence et un mode de gestion privé (rentabilité financière, etc.) l'emportent, que le propriétaire soit l'État à 100%, 51% ou 0%.

Si un congrès du PS devait avoir un véritable enjeu, c'est bien celui-là : mettre fin au double langage. Un lorsque le parti est au pouvoir, un autre lorsqu'il est dans l'opposition.

 

* directive européenne 97/67/CE du 15 décembre 1997

** directive européenne 2002/39/CE du 10 juin 2002

18 novembre 2008

Appeler un racialiste un racialiste

racialisme.jpgUne amie (merci Anne !) m'a signalé un article du quotidien Le Monde qui m'avait échappé. Il s'agit plus exactement de la chronique de la médiatrice publiée ce week-end. "L'élection de Barack Obama a un avantage annexe, appréciable pour les médiateurs : on peut enfin écrire 'noir' (...) sans recevoir une volée de messages criant au racisme", écrit Véronique Maurus. "C'est nouveau: jusque-là, mentionner la couleur de la peau, les racines ethniques ou religieuses d'une personne était tabou", poursuit-elle en dénonçant dans son papier le "politiquement correct".

Il ne s'agit pourtant pas forcément de "tabou" ou de soumission au "politiquement correct". Je cite encore Véronique Maurus: "Rien dans les chartes de déontologie n'interdit de préciser la couleur de peau, l'origine ethnique, la religion ou l'orientation sexuelle d'une personne, à condition que ces détails soient pertinents dans le contexte - ou que l'intéressé s'en prévale".

Or, justement, autant dans le contexte de la société racialiste américaine préciser la couleur de la peau peut être sociologiquement pertinent, autant le faire dans le contexte de la société française relève d'un parti pris déterminé (lire par exemple dans Le Monde: "La diversité ethnique s'impose lentement sur les écrans français", 22/09/2008). Il s'agit plus précisément d'un parti pris racialiste (qui, contrairement au racisme, n'établit pas de hiérarchie raciale).

Or, jusque-là, en France, un tel parti pris était marginalement cantonné à l'extrême droite. Le courant racialiste (ou "racisme différentialiste" selon Pierre-André Taguieff) dit Nouvelle Droite - qui a depuis longtemps réorienté son combat du champ politique vers le champ culturel ("métapolitique" inspirée du communiste italien Antonio Gramsci) - est donc en passe de remporter une victoire sémantique (sans d'ailleurs que ce courant y soit pour quelque chose). "Qui commence à parler comme nous finira peut-être par penser comme nous", se félicite ainsi Fabrice Robert, animateur du groupuscule d'extrême droite Les Identitaires, dans le dernier numéro de l'hebdomadaire Minute. Il ne s'agit alors plus de considérer la couleur de peau comme un élément de description d'une personne (qui ne doit alors pas être davantage tabou que la couleur des yeux ou des cheveux, la taille, la corpulence etc.) mais comme une composante de son identité.

"Cette approche décomplexée (de fraîche date il est vrai) n'a pas encore gagné la France", déplore Véronique Maurus en expliquant que de nombreux lecteurs "se sont plaints du racisme sous-jacent de nos articles".

S'il s'agit en réalité de racialisme et non de racisme, félicitons-nous plutôt de la saine et républicaine réaction de ces lecteurs: tout n'est semble-t-il pas encore perdu pour la citoyenneté une et indivisible!