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30 avril 2013

Le Pen contre Le Pen: la guerre des deux FN

I0000sTXiRtF2WSs.jpgLe débat interne sur le positionnement n'est pas nouveau au FN.

Il ressurgit toutefois aujourd'hui de façon inédite car, pour la première fois, il divise publiquement le "clan Le Pen" avec l'opposition de deux lignes:

 

 

 

FN ni droite ni gauche

Pour les uns, le FN doit représenter "l'alternative au système UMPS", c'est-à-dire à la droite et à la gauche, renvoyés dos à dos en tant que partis d'une même "mondialisation ultralibérale".

Les partisans de ce positionnement "ni droite ni gauche" ne souhaitent pas d'alliance avec l'UMP, voire même refusent de manifester aux côtés des parlementaires de droite (cf. la position officielle du FN face aux manifestations contre le "mariage pour tous").

Ils ciblent l'électorat populaire - y compris les déçus de François Hollande - et défendent une ligne sociale et étatiste ("État stratège") au sein de laquelle, dans un paradoxe qui n'est qu'apparent, se retrouvent des militants issus aussi bien de la gauche républicaine chevènementiste que de l'extrême droite nationaliste révolutionnaire.

Ce positionnement est défendu par Marine Le Pen et, bien entendu puisqu'il en est la cheville ouvrière, Florian Philippot (ancien chevènementiste).

 

 

FN à la droite de la droite

Pour les autres, le FN doit au contraire représenter "la vraie droite" face à la "fausse droite" incarnée par l'UMP. Pour eux, le FN est donc le prolongement de la droite, la différence avec cette dernière étant perçue comme une question de degré et non de nature.

Comme le FN au début des années 1980, ils défendent une ligne anti-étatiste et veulent s'adresser à l'électorat de droite exaspéré par l'élection de François Hollande et le retour de la gauche au pouvoir. Les partisans de ce positionnement à la droite de la droite sont logiquement favorables à des alliances avec l'UMP et auraient voulu que le FN appelle officiellement à manifester aux côtés de Jean-François Copé derrière le collectif "La Manif pour tous".

Ce positionnement est défendu par Jean-Marie Le Pen (qui, rappelons-le, fut réélu en 1958 sous l'étiquette des Indépendants de Paris et siégea alors au sein du même groupe que Valéry Giscard d'Estaing), Louis Aliot (ce dernier semble toutefois s'être rapproché de la première ligne) et Marion Maréchal - Le Pen (lire à ce sujet son entretien dans Le Monde daté de ce jour).

 

 

(comme à chaque article mentionnant des débats internes au FN, je sais par avance de qui je vais recevoir les habituels démentis).

29 avril 2013

L'Union nationale: définition et faux amis

Qu'est-ce que l'Union nationale?

L'Union nationale correspond à la formation d'un gouvernement unissant l'ensemble des forces politiques face à une situation exceptionnelle, en particulier lorsque l'indépendance nationale, l'intégrité du territoire ou la continuité de l'État sont menacées.

François Bayrou récusait d'ailleurs au départ l'expression qui lui est maintenant accolée en expliquant que l'Union nationale "suppose que l'on embarque tout le monde" (2012 état d'urgence, Plon, 2011), de l'extrême droite à l'extrême gauche, aux antipodes donc de son souhait d'une majorité rassemblant les "modérés" de gauche et de droite en passant par le centre.

Exemple d'Union nationale: l'Union sacrée durant la première guerre mondiale, avec la participation au gouvernement de personnalités allant de l'extrême droite catholique et royaliste (Denys Cochin) à l'extrême gauche socialiste unifiée (Jules Guesde). "En temps de paix, nous sommes divergents et bruyants ...mais il n'y a plus qu'une armée quand l'ennemi se montre", expliquait ainsi Denys Cochin (Le Dieu allemand, Bloud et Gay, 1917).

 

Union nationale et faux amis

En France, l'expression "gouvernement d'union nationale" correspond historiquement au gouvernement de droite dirigé en 1926 par Raymond Poincaré. Ce gouvernement n'est pas directement issu des urnes, mais est la conséquence du retournement d'alliance d'une partie du centre (la Gauche radicale), qui abandonne en cours de législature la gauche pour s'allier avec la droite.

À l'étranger, les "grandes coalitions" sont souvent assimilées par erreur en France à une situation d'Union nationale. Mais il s'agit en fait d'un gouvernement regroupant le principal parti de droite et le principal parti de gauche. Ces coalitions sont des coalitions par défaut, en raison d'une représentation proportionnelle ne permettant pas de dégager une majorité nette.

Exemples:

- en Allemagne, le gouvernement CDU-CSU - SPD d'Angela Merkel entre 2005 et 2009, duquel le centre (FDP) était écarté.

- en Italie, le nouveau gouvernement (28 avril 2013) d'Enrico Letta regroupant des partis de gauche (Partito Democratico), du centre (Scelta Civica) et de droite (Il Popolo della Libertà).

 

Bref, un gouvernement d'Union nationale ne signifierait rien aujourd'hui en France, où le PS dispose à lui tout seul de la majorité absolue à l'Assemblée nationale (qui bénéficie face au Sénat du dernier mot dans la procédure législative).

Ce qui aurait en revanche une signification, ce serait:

- a minima une recomposition du paysage politique, l'aile droite du PS (dont est issu François Hollande) étant en réalité idéologiquement plus proche du centre que de l'aile gauche du PS (reste à savoir s'il existerait une majorité alternative dans l'hypothèse d'une défection de cette dernière).

- a maxima la formation d'une majorité rassemblant toutes les forces politiques soutenant l'actuelle construction européenne (majorité du PS, MODEM, UDI et quasi-totalité de l'UMP), c'est-à-dire favorables à une politique de rigueur, en cas de montée en puissance lors des échéances électorales de 2017 des partisans d'une autre politique.

23 avril 2013

Qui dit mariage et adoption au nom de l'égalité, dit-il forcément PMA?

jspma.pngPour les uns c'est une attente, pour les autres c'est une crainte: puisque le mariage et l'adoption vont être ouverts aux couples de personnes de même sexe au nom de l'égalité, la "procréation médicalement assistée" le sera forcément aussi au nom du même principe.

 

Qu'en est-il réellement?

 

Examinons ce que dispose le code de la santé publique (article L. 2141-2 + article L. 2141-7 pour l'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur):

"L'assistance médicale à la procréation a pour objet de remédier à l'infertilité d'un couple ou d'éviter la transmission à l'enfant ou à un membre du couple d'une maladie d'une particulière gravité. Le caractère pathologique de l'infertilité doit être médicalement diagnostiqué.
L'homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l'insémination."

 

L'égalité des droits consisterait à remplacer les mots "l'homme et la femme formant le couple" par les mots "les personnes formant le couple":

"L'assistance médicale à la procréation a pour objet de remédier à l'infertilité d'un couple ou d'éviter la transmission à l'enfant ou à un membre du couple d'une maladie d'une particulière gravité. Le caractère pathologique de l'infertilité doit être médicalement diagnostiqué.
Les personnes formant le couple doivent être vivantes, en âge de procréer et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l'insémination."

 

Or, ce simple remplacement, sur le modèle de la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, n'ouvrirait en rien l'assistance médicale à la procréation à ces mêmes couples. Tout simplement parce que leur "stérilité" ne présente pas un caractère pathologique, relevant d'un diagnostic médical, mais possède un caractère naturel (la nature sexuée de la reproduction humaine: une personne seule ou deux personnes de même sexe ne peuvent pas procréer).

Ce qui signifie que, même après promulgation de la loi Taubira, un recours judiciaire fondé sur l'égalité des droits (qu'il s'agisse d'une Question prioritaire de constitutionnalité devant le Conseil constitutionnel ou d'une saisine de la Cour Européenne des droits de l'Homme) pourrait peut-être aboutir à une modification du code de la santé publique, mais en rien aboutir dans les faits à l'ouverture de l'assistance médicale à la procréation aux couples de personnes de même sexe.

 

Pour y aboutir, il faudrait engager une réflexion plus globale sur la "procréation médicalement assistée". Réflexion qui concernerait alors non seulement les couples homosexuels, mais aussi les couples hétérosexuels (en particulier lorsque la femme est ménopausée) et les femmes célibataires (dans la logique de l'adoption par les personnes célibataires).

C'est toute la différence, que j'ai déjà eu l'occasion de détailler ici, entre d'une part l'assistance médicale à la procréation (AMP), réponse médicale à l'infertilité pathologique d'un couple, et d'autre part la "procréation médicalement assistée" (PMA), technique de procréation lorsque la nature ne le permet pas ou plus. Il est donc erroné de parler d'une éventuelle "extension de la PMA aux couples de femmes", puisqu'en réalité la PMA (à ne pas confondre avec l'AMP) n'existe pas en France pour les couples hétérosexuels.

Quoi qu'il en soit, ce serait demain un autre débat (avec ou non une majorité parlementaire sur cette nouvelle question), déconnecté de l'ouverture (que je soutiens) aujourd'hui du mariage et de l'adoption aux couples de personnes de même sexe.

22 avril 2013

Des listes "Manif pour tous" aux élections municipales: quelles conséquences pour l'UMP et le FN?

Frigide Barjot a annoncé dimanche 21 avril, dans un entretien au journal Corse Matin, que "le concept de ‘‘La manif pour tous’’ va investir le terrain électoral dès les prochaines élections municipales de 2014". Sans dire si elle entend ou non être elle-même candidate et sans dévoiler de liste, la fondatrice du collectif a précisé que l'idée était de "présenter des candidats" dans plusieurs villes "sous une forme et une appellation qui restent à définir".

La présence aux municipales de listes issues de "La manif pour tous" constituerait un handicap pour l'UMP dans certaines villes ancrées à droite.

Aux élections cantonales de 2011, déjà, dans les Yvelines (cantons du Chesnay, de Saint-Germain-en-Laye-sud, de Versailles-nord-ouest et de Versailles-sud) ou les Hauts-de-Seine (cantons de Neuilly-nord (1) et de Levallois-sud), plusieurs candidats UMP avaient été battus par des divers droite, souvent liés au Parti chrétien-démocrate de Christine Boutin (2), au MPF de Philippe de Villiers ou au CNIP du député Gilles Bourdouleix.

C'est précisément l'un d'eux, Philippe Brillault, maire du Chesnay, qui fut le mandataire de la pétition déposée par "La manif pour tous" devant le Conseil économique, social et environnemental. Même si l'intéressé fut largement distancé aux élections législatives de 2012 par l'UMP Henri Guaino... justement devenu l'un des chevau-légers de la droite contre le projet de loi ouvrant le mariage civil aux couples de personnes de même sexe (3).

Les zones géographies de cet électorat potentiel sont sans doute assez proches de celles de Christine Boutin, lors de sa candidature à l'élection présidentielle de 2002 comme lors du scrutin interne à l'UMP en 2004:

UMP-2004-Boutin.gif

2002-t1-boutin.gif

 

La concurrence serait en revanche moins forte mais non sans conséquence pour le Front national. Il existe en effet pour le parti de Marine Le Pen un électorat potentiel, qui correspond à celui de Jean-Marie Le Pen aux élections européennes - "fondatrices" - de 1984:

"Aux élections européennes de 1984, le FN trouve ses meilleurs appuis dans une bourgeoisie de droite, catholique, aisée, exaspérée par l'arrivée des socialo-communistes au pouvoir. À partir de 1986, cette bourgeoisie retourne au vote utile RPR-UDF. Le FN progresse alors chez les petits commerçants et artisans, la fraction la plus populaire de l'électorat de droite, inquiète pour son avenir. Ensuite, il progresse dans les milieux populaires, déçus par la gauche"
Nonna Mayer, Le Front national. Mutations de l'extrême droite française, sous la direction de Pascal Delwit, Éditions de l'Université de Bruxelles, 2012

Cet électorat avait commencé à revenir aux élections régionales de 2010:

- Gérald Andrieu (Marianne): Vous constatez également une modification géographique du vote Front national. Il a toujours eu plus d’audience à l'Est. C’est encore le cas aujourd’hui. Néanmoins vous notez une réduction de l’écart entre Est et Ouest du pays?
- Jérôme Fourquet (Ifop): Géographiquement, cet écart est en effet moins manifeste que par le passé. Cette différence de score était liée au fait que l’Ouest possédait une composante populaire moins forte que l’Est. Ce que l’on observe, c’est que l’électorat de droite disons « classique » de l’Ouest du pays, cet électorat de droite plutôt bourgeois qui s'oppose à l'ouverture et ressemble à l'électorat du Front du début des années 1980 s’est mobilisé en faveur du FN, tandis qu’à l’Est ses bataillons populaires se sont largement abstenus. C’est très sensible, si l’on compare les résultats de mars 2010 à ceux de la présidentielle de 2002. On note le même phénomène à Paris. C’est dans le 16e arrondissement qu’il réalise son meilleur score alors que par le passé, c’était dans le 18e, les zones proches du périphérique Est...

Or, la présence de listes issues de "La Manif pour tous" pourrait bloquer le FN dans la reconquête de cet électorat. Lors de ces mêmes élections régionales, l'échec de la liste en Île-de-France avait ainsi été imputé - de façon certes un peu exagérée selon moi - à la présence d'une "Liste chrétienne". Ce n'est d'ailleurs sans doute pas un hasard si c'est la tête de liste du FN à Paris, Wallerand de Saint-Just, qui vient de publier un communiqué pour dénoncer "Frigide Barjot démasquée", qui poursuivrait "exclusivement un but de promotion personnelle en accord avec l'UMP".

 

Voici quelques graphiques pour illustrer ces mutations de l'électorat frontiste:

1984-lepen.gif

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Source: Sofres, 19-28/06/1984

FN2012-rel.gif
Source: Ifop, 22/04/2012

FN1984.gif
Source: Sofres, 19-28/06/1984

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Source: Ifop, 22/04/2012


(1) Jean-Christophe Fromantin, maire de Neuilly-sur-Seine, a entre-temps participé à la création de l'UDI, dont il fut à l'Assemblée nationale l'orateur principal contre le projet de loi Taubira.

(2) Bétarice Bourges, égérie du "Printemps français", la frange la plus activiste en rupture avec le collectif de Frigide Barjot, fut candidate divers droite aux élections législatives de 2012, sans étiquette mais - selon mes informations - rattachée au PCD de Christine Boutin pour la première fraction du financement public.

(3) Aux élections législatives, les candidats labellisés PCD ou UPF (MPF et CNIP) n'ont jamais dépassé à l'échelon de la circonscription 10% des suffrages exprimés (seuil de maintien au second tour des élections municipales) sans le soutien de l'UMP, à l'exception du villiériste Dominique Souchet (député sortant) en Vendée. Une étude plus détaillée à l'échelon de la commune serait très simple à réaliser pour qui en a le temps!

20 avril 2013

En défense de La Manif pour tous, des Veilleurs et de l'Église catholique

Je connais oh combien les contraintes qui pèsent sur l'écriture d'un article (le temps, la place, etc.). Il m'arrive moi-même de devoir répondre à des personnes ou associations mécontentes de la façon dont je les ai présentées (par exemple, ce vendredi, les "HomMen").

Sans vouloir faire de procès d'intention à certains confrères, lorsque des erreurs sont trop souvent répétées on peut commencer à se demander s'il n'y a pas en réalité, derrière, une volonté de nuire.

C'est particulièrement le cas au sujet de "La Manif pour tous" depuis que le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe est en deuxième lecture à l'Assemblée nationale.

Le collectif "La Manif pour tous" organise tous les jours une manifestation, déclarée auprès de la préfecture de police de Paris jusqu'à 22 heures. La grande majorité des manifestants se disperse alors. Non pas parce que ce sont des tièdes (Apocalypse 3, 16), mais parce qu'ils veulent utiliser leur liberté d'opinion et d'expression sans sortir, dans un État de droit démocratique, de la légalité.

Tout ce qui se déroule après 22 heures, ce n'est donc plus "La Manif pour tous" et, sur Twitter, ce n'est plus le mot-dièse #ManifPourTous.

 

Une minorité reste toutefois autour de l'Assemblée nationale.

Au sein de cette minorité, une petite minorité, marginale et très politisée, va au contact des forces de l'ordre. Réprimer cette minorité relève de l'ordre public le plus élémentaire.

Mais la majorité de cette minorité se regroupe sur l'esplanade des Invalides, pacifiquement assise devant des bougies à lire des textes. Ce sont les "Veilleurs", dans un esprit qui rappelle les veillées scoutes ou les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) de l'Église catholique, dont sont apparemment issus les organisateurs.

Que les choses soient claires: participer à une manifestation non déclarée sur la voie publique puis refuser d'obtempérer aux sommations de dispersion des forces de l'ordre, c'est prendre ses responsabilités (interpellation) et courir le risque de recevoir un jet de gaz lacrymogène ou un coup de matraque.

Mais que les choses soient claires aussi: le ministère de l'Intérieur est responsable de la réponse des forces de l'ordre, qui doit par nature toujours être proportionnée et mesurée.

 

Pour résumer, un compte-rendu honnête des évènements exige selon moi de distinguer trois groupes:

- ceux qui restent dans la légalité ("La Manif pour tous")

- ceux qui choisissent la transgression pacifique ("Veilleurs")

- ceux qui se livrent à des actes de violence

 

Enfin, un dernier point en ce qui concerne ce vendredi.

Je lis que "des prêtres en soutane ont également fait reprendre à la foule des chansons de leur composition: 'À l'Assemblée, la Taubira a décidé d'assassiner les enfants du pays réel', chantaient-ils, ou 'Messieurs les CRS, rejoignez notre mouvement et matraquez les décadents' (source: AFP).

Dans l'esprit des gens, qui dit prêtre (1) dit Église catholique. Or, comme j'en avais eu le pressentiment hier soir en tweetant, il s'agirait de Xavier Beauvais, abbé de l'église Saint-Nicolas-du-Chardonnet à Paris, membre de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X. C'est-à-dire un intégriste, schismatique et donc non membre de l'Église catholique (2).

Amalgamez, amalgamez, il en restera toujours quelque chose...

 

(1) Le fait qu'il soit "en soutane" n'est pas forcément à mes yeux un signe d'intégrisme. Si sur plusieurs points je pourrais être qualifié de progressiste (communion des divorcées-remariées, ordination des femmes), je trouve très bien qu'un ministre du culte porte un signe distinctif, y compris s'il le souhaite un uniforme.

(2) Contrairement à ce que certains pensent, la réintégration de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X dans l'Église catholique n'a pas abouti: "tant que les questions concernant la doctrine ne sont pas éclaircies, la Fraternité n'a aucun statut canonique dans l'Église, et ses ministres - même s'ils ont été libérés de la punition ecclésiastique - n'exercent de façon légitime aucun ministère dans l'Église" (lettre de Benoît XVI, 10/03/2009). Xavier Beauvais, puisqu'il est question de lui, ayant par exemple dénoncé "le diktat de la Rome moderniste".

 

Seuls regrets:

- que la grande masse des opposants au "mariage pour tous" ne se désolidarise pas plus fortement, comme le fait Frigide Barjot, des dérapages homophobes et de l'extrême droite intégriste.

- m'être senti un peu seul vendredi soir sur Twitter, alors que j'ai, à titre personnel, une autre position que "La Manif pour tous" et les "Veilleurs", à m'élever contre ces amalgames.

19 avril 2013

Mariage pour tous: derrière les invectives, des divergences de fond?

L'examen parlementaire du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe va s'achever.

Derrière l'argument de l'égalité des droits entre hétérosexuels et homosexuels (1) se cachaient en réalité des conceptions différentes de l'Homme et de la société (présentées en 140 caractères - ou presque - comme sur Twitter):

 

Il y a ceux pour qui le mariage est l'institution unissant un homme et une femme en vue de la procréation.

Il y a ceux pour qui le mariage est l'institution consacrant l'amour entre deux personnes.

Et il y a ceux pour qui le mariage est un contrat régissant la vie commune entre deux personnes.

 

Il y a ceux pour qui être parent, c'est engendrer un enfant.

Et il y a ceux pour qui être parent, c'est élever un enfant.

 

Il y a ceux pour qui un enfant a naturellement besoin pour son développement d'une mère, référent féminin, et d'un père, référent masculin.

Et il y a ceux pour qui les figures maternelle et paternelle sont le fruit d'une société genrée.

 

Il y a ceux pour qui l'égalité c'est le droit pour tous, couples hétérosexuels et couples homosexuels, de se marier.

Et il y a ceux pour qui l'égalité c'est le droit pour tous les enfants d'avoir un père et une mère.

 

Il y a ceux pour qui débattre, c'est insulter l'ennemi, forcément un méchant homophobe ou forcément un méchant destructeur de la famille et de la société (2).

Et il y a ceux pour qui débattre, c'est d'abord entendre et comprendre les arguments de l'autre.

 

 

(1) Rappelons, même si cela n'invalide bien entendu pas d'autres arguments en faveur du "mariage pour tous", que le Conseil constitutionnel a jugé que "la différence de situation entre les couples de même sexe et les couples composés d'un homme et d'une femme peut justifier une différence de traitement quant aux règles du droit de la famille" sans qu'il y ait discrimination et rupture d'égalité (Décision n° 2010-92 QPC du 28 janvier 2011).

(2) Notons que certains slogans "un papa, une maman" peuvent blesser des enfants de couples homosexuels, ce qui ne retire rien de la sincérité de ceux qui pensent que tout enfant doit avoir droit à un père et à une mère: complexité du débat politique...

18 avril 2013

Qui sont les opposants radicaux au mariage pour tous?

Je vous invite à lire mon article publié dans La Croix:
 

15 avril 2013

Sénat et anomalie de la démocratie

Cela fait bien longtemps que je le demande: tout vote sur l'ensemble d'un texte devrait donner lieu à un scrutin public. Tout électeur devrait en effet, pour le moins, pouvoir connaître le vote de son député ou de son sénateur.

 

L'adoption, vendredi 12 avril, à main levée (!), du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe en a encore donné une illustration.

 

D'une part, personne n'a demandé de scrutin public. Ni dans la majorité de gauche. Ni dans l'opposition de droite: les présidents des groupes UMP (Jean-Claude Gaudin) et UDI (François Zocchetto) ou trente sénateurs de droite présents pouvaient pourtant le faire.

D'autre part, les groupes ont communiqué à la présidence du Sénat les intentions de vote de leurs membres... qui seront selon Le Monde publiées au Journal Officiel (!).

On ose imaginer, sur un débat qui mobilise les Français (pour ou contre), au moment où les politiques soufrent d'une perte de confiance, qu'il s'agirait d'un petit arrangement entre amis pour "faire comme si" nos sénateurs avaient accompli leur travail de parlementaire en étant présents puis en votant en toute transparence à travers un scrutin public. On ose l'imaginer, car ce serait bien trop lamentable.

Quoi qu'il en soit, publier officiellement des intentions de vote constitue un véritable délire institutionnel. Pis: une anomalie parmi les démocraties (tous droits réservés Lionel Jospin).